• Le ciel comme un lac d'or pâle s'évanouit,
    On dirait que la plaine, au loin déserte, pense ;
    Et dans l'air élargi de vide et de silence
    S'épanche la grande âme triste de la nuit.

    Pendant que çà et là brillent d'humbles lumières,
    Les grands boeufs accouplés rentrent par les chemins ;
    Et les vieux en bonnet, le menton sur les mains,
    Respirent le soir...

  • Il est d'étranges soirs où les fleurs ont une âme,
    Où dans l'air énervé flotte du repentir,
    Où sur la vague lente et lourde d'un soupir
    Le coeur le plus secret aux lèvres vient mourir.
    Il est d'étranges soirs, où les fleurs ont une âme,
    Et, ces soirs-là, je vais tendre comme une femme.

    Il est de clairs matins, de roses se coiffant,
    Où l'âme a des...

  • Maints soirs nous errons dans le val
    Que vont drapant les heures grises.
    Des pleurs perlent ses yeux d'alises
    Quand elle ouït les Cydalises
    De ce dieu que fut de Nerval.

    Ah ! voudrait-elle en long vol d'or
    Les rejoindre dans des domaines
    Plus vastes que les cours romaines
    Où par d'éternelles semaines
    La coupe de Volupté dort,

    Ou...

  • - Oui, je souffre, ces soirs, démons mornes chers Saints.
    - On est ainsi toujours au soupçon des Toussaints.
    - Mon âme se fait dune à funèbres hantises.
    - Ah ! donne-moi ton front, que je calme tes crises.

    - Que veux-tu ? je suis tel, je suis tel dans ces villes,
    Boulevardier funèbre échappé des balcons,
    Et dont le rêve élude, ainsi que des faucons,...

  • Lorsque rentrent des alentours,
    Tels soirs d'été, les attelages,
    Les vieilles gens des vieux villages
    Se rassemblent aux carrefours.

    Les plus anciens semblent descendre
    Du calvaire de leurs cent ans ;
    Leurs petits yeux sont clignotants
    Dans leur face couleur de cendre.

    Ils sont à bout de tant marcher ;
    Ils radotent, sourient et...

  • (II)

    Sous les vitres du hall nitreux que le froid fore
    Et vrille et que de mats brouillards baignent de vair,
    Un soir, en tout à coup de gel, s'ouvre l'hiver,
    Dans le foyer, fourbi de naphte et de phosphore

    Qui brûle : et le charbon pointu se mousse d'or
    Et le posthume été dans l'or se réitère ;
    Il émeraude un bol, il enturquoise un verre...

  • Le vieux crapaud de la nuit glauque
    Vers la lune de fiel et d'or,
    C'est lui, là-bas, dans les roseaux,
    La morne bouche à fleur des eaux,
    Qui rauque.

    Là-bas, dans les roseaux,
    Ces yeux immensément ouverts
    Sur les minuits de l'univers,
    C'est lui, dans les roseaux,
    Le vieux crapaud de mes sanglots.

    Quand les taches des...