• Il fera longtemps clair ce soir, les jours allongent,
    La rumeur du jour vif se disperse et s'enfuit,
    Et les arbres, surpris de ne pas voir la nuit,
    Demeurent éveillés dans le soir blanc, et songent...

    Les marronniers, sur l'air plein d'or et de lourdeur,
    Répandent leurs parfums et semblent les étendre ;
    On n'ose pas marcher ni remuer l'air tendre
    ...

  • Être dans la nature ainsi qu'un arbre humain,
    Étendre ses désirs comme un profond feuillage,
    Et sentir, par la nuit paisible et par l'orage,
    La sève universelle affluer dans ses mains !

    Vivre, avoir les rayons du soleil sur la face,
    Boire le sel ardent des embruns et des pleurs,
    Et goûter chaudement la joie et la douleur
    Qui font une buée humaine...

  • Voici venu le froid radieux de septembre :
    Le vent voudrait entrer et jouer dans les chambres ;
    Mais la maison a l'air sévère, ce matin,
    Et le laisse dehors qui sanglote au jardin.

    Comme toutes les voix de l'été se sont tues !
    Pourquoi ne met-on pas de mantes aux statues ?
    Tout est transi, tout tremble et tout a peur ; je crois
    Que la bise grelotte...

  • Rire ou pleurer, mais que le coeur
    Soit plein de parfums comme un vase,
    Et contienne jusqu'à l'extase
    La force vive ou la langueur.

    Avoir la douleur ou la joie,
    Pourvu que le coeur soit profond
    Comme un arbre où des ailes font
    Trembler le feuillage qui ploie ;

    S'en aller pensant ou rêvant,
    Mais que le coeur donne sa sève
    Et...

  • Tout le plaisir de vivre est tenu dans vos mains,
    Ô Jeunesse joyeuse, ardente, printanière,
    Autour de qui tournoie l'emportement humain
    Comme une abeille autour d'une branche fruitière !

    Vous courez dans les champs, et le vol d'un pigeon
    Fait plus d'ombre que vous sur l'herbe soleilleuse.
    Vos yeux sont verdoyants, pareils à deux bourgeons,
    Vos...

  • Vous êtes mort un soir à l'heure où le jour cesse.
    Ce fut soudain. La douce et terrible paresse
    En vous envahissant ne vous a pas vaincu.
    Rien ne vous a prédit la torpeur et la tombe.
    Vous eûtes le sommeil. Moi, je peine et je tombe,
    Et la plus morte mort est d'avoir survécu.

  • Voici l'été encor, la chaleur, la clarté,
    La renaissance simple et paisible des plantes,
    Les matins vifs, les tièdes nuits, les journées lentes,
    La joie et le tourment dans l'âme rapportés.

    - Voici le temps de rêve et de douce folie
    Où le coeur, que l'odeur du jour vient enivrer,
    Se livre au tendre ennui de toujours espérer
    L'éclosion soudaine et...

  • Le gazon soleilleux est plein
    De campanules violettes,
    Le jour las et brûlé halette
    Et pend aux ailes des moulins.

    La nature, comme une abeille,
    Est lourde de miel et d'odeur,
    Le vent se berce dans les fleurs
    Et tout l'été luisant sommeille.

    - Ô gaieté claire du matin
    Où l'âme, simple dans sa course,
    Est dansante comme une...

  • Ô lumineux matin, jeunesse des journées,
    Matin d'or, bourdonnant et vif comme un frelon,
    Qui piques chaudement la nature, étonnée
    De te revoir après un temps de nuit si long ;

    Matin, fête de l'herbe et des bonnes rosées,
    Rire du vent agile, oeil du jour curieux,
    Qui regardes les fleurs, par la nuit reposées,
    Dans les buissons luisants s'ouvrir...

  • La lune, dites-nous si c'est votre plaisir,
    Ô lune cajoleuse !
    Que les hommes se plient au gré de vos désirs
    Comme la mer houleuse,

    Est-ce votre vouloir que ceux qui tout le jour
    Furent doux et tranquilles,
    Succombent dans le soir au péché de l'amour
    Par les champs et les villes ?

    - Les baisers montent-ils vers vous comme de l'eau
    ...