Sonnet
Vous faites voir des os quand vous riez, Heleine,
Dont les uns sont entiers et ne sont gueres blancs ;
Les autres, des fragmens noirs comme de l'ebene
Et tous, entiers ou non, cariez et tremblans.
Comme dans la gencive ils ne tiennent qu'à peine
Et que vous esclattez à vous rompre les flancs,
Non seulement la toux, mais vostre seule...
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Stances burlesques
Bel enfant de quinze ans, dru comme pere et mere,
Aymable comme un Ange ou deux,
Que le fils de celuy qui sera ton beau-pere
Se pourra dire un homme heureux !
Ils ont fait de leur mieux, ceux qui t'ont mise au monde,
Et t'ont faite avec tant d'appas,
Que s'ils vouloient tascher d'en faire une seconde,
Je crois qu'ils ne... -
Ingratte, je n'ayme que toy
Et tu feins de m'aymer, ingratte :
Tandis que ta bouche me flatte,
Ton ame me manque de foy.
Ingratte, je n'ayme que toy
Et tu feins de m'aymer, ingratte.
Ta bouche l'a cent fois juré,
Et cent fois a menty ta bouche,
Que mon amour discret te touche
Et que ton coeur m'est asseuré.
Ta bouche l'a cent fois... -
Mascarade
Au Roy.
Monarque, le plus grand des Roys,
Et des hommes le plus aimable,
Seul digne de donner des loix
A toute la terre habitable,
Le vray moyen de parvenir
N'est rien que celuy de vous plaire :
C'est ce qu'icy nous fait venir ;
De plus huppés que nous en voudroient autant faire.
Nous sçavons que les courtisans,... -
Contre ceux qui font passer leurs
libelles diffamatoires sous
le nom d'autruy.
Beaux Esprits du Pont-neuf, Insectes de Parnasse,
Dont les productions, aussi froides que glace,
Font naistre la tristesse au lieu de divertir,
Vous verray-je toûjours à mes dépens mentir ?
Et mon nom, supposé dans vos oeuvres de bale,
Me sera-t'il toûjours... -
Ma belle Dame de BOURRON,
Le pauvre Diable de Scarron
Tres-humblement vous remercie
De vos trois melons et vous prie
De vous contenter bonnement
De son petit remerciment.
Il voudroit bien, à la pareille,
Vous envoyer quelque merveille ;
Car merveille peut on nommer
Le melon qu'il vient d'entamer ;
Mais chez un homme de sa sorte
Que rien n'... -
Amour nabot,
Qui du jabot,
De Dom Japhet
As fait
Une ardente fournaise,
Helas ! helas !
Je suis bien las
D'estre remply de braise.
Ton feu gregeois
M'a fait pantois
Et dans mon pis
A mis
Une essence de braize.
Bon Dieu ! bon Dieu !
Le coeur en feu,
Peut-on estre à son aise ? -
Je vous aymois : vous me l'aviez permis ;
J'esperois d'estre aymé : vous me l'aviez promis.
Mais, helas ! belle Iris, je voy bien le contraire ;
Je n'ose en murmurer
De peur de vous deplaire ;
Mais il m'est permis d'expirer,
S'il m'est ordonné de me taire.
Dedans vos fers, charmé de vos appas,
Je souffrois mes tourmens et ne m'en plaignois... -
Mes yeux, vous avez veu Cloris ;
Mon coeur, vous songez à ses charmes,
Vous l'entendez chanter : helas ! vous estes pris ;
Rendez, rendez les armes,
Ô mon coeur, ô mes yeux ! c'estoit trop hazarder
Que de l'entendre et de la regarder.
Helas ! vous sçavez le danger
Qui suit un amour temeraire,
Et qu'un coeur dans ses fers ne s'en peut dégager ;... -
Quand j'ay bien faim et que je mange
Et que j'ay bien dequoy choisir,
Je ressens autant de plaisir
Qu'en grattant ce qui me demange.
Cher Amy, tu m'y faits songer :
Chacun fait des Chansons à boire,
Et moy, qui n'ay plus rien de bon que la machoire,
Je n'en veux faire qu'à manger.
Quand on se gorge d'un potage
Succulent comme un consommé...