• Il estoit bien seant que ce corps veritable,
    Qui fut le vestement du grand verbe incarné
    Fust conceu d'un pur sang sainctement façonné
    D'une qui ne se vist d'aucun peché coulpable.

    Il estoit bien seant, qu'à ce saint corps mourable
    Mort en fin pour ceux là pour lesquels il fut né
    Par un juste, et sainct homme un tombeau fut donné,
    Neuf et net qui ne...

  • Quelles obscuritez, quels importuns nuages
    Vont de mon ame, helas, le jour obscurcissant !
    Son Soleil n'y luit plus, et le teint palissant
    De la lune n'y rend que frayeur, et qu'ombrages.

    Il ne luy suffit pas qu'ell' ait perdu tels gaiges
    De l'amour de son Dieu qui la va delaissant,
    De son oeil chassieux le trait s'afoiblissant
    D'un tel aveuglement...

  • Ce n'est pas sans raison, que l'homme on accompare
    A l'arbre renversé, dont la racine en haut
    La cyme tend en bas, puisque tousjours il faut
    Qu'il ait son centre au Ciel, qu'il ait son Dieu pour phare.

    Comme de son tresor vit le coeur de l'avare,
    Et de tous autres biens rien du tout ne luy chaut,
    Ainsi l'homme chrestien né pour franchir ce saut
    ...

  • Le Phenix ja chargé de chair, et de vieillesse
    Amoureux d'une mort, qui meure de plaisir,
    Vole aux montz les plus hauts pour mill' odeurs choisi
    Don en apres son lict, du lict sa tombe il dresse.

    Là de douceur, il meurt, ains que sa mort le presse,
    Et faisant de sa cendre, un vermillon jaillir,
    Ses plumes il reprend, et son premier desir
    D'estendre...

  • Je suis un voleur, un filou,
    Un scélérat, je le confesse,
    Mais quand j'ai fait quelque bassesse,
    Hélas, je n'avais pas le sou !
    La faim rend un homme excusable,
    Un pauvre de grand appétit
    Peut bien être tenté du diable,
    Mais pour me voler mon esprit,
    Êtes-vous donc si misérable ?

    Or contre un semblable méfait,
    Notre code est muet,...

  • C'est à vous qu'ici je dédie
    Ces vers, enfants de mon loisir.
    Déjà ma bouteille est finie
    Et ma raison va revenir.
    Ne craignez pas que la sagesse
    Change votre image à mes yeux ;
    Je n'ai pas besoin de l'ivresse
    Pour vous voir bon et vertueux.

  • En expirant, le cygne chante encor,
    Ah laissez-moi chanter mon chant de mort !...

    Ah laissez-moi chanter, moi qui sans agonie
    Vais vous quitter dans peu d'instants,
    Qui ne regrette de la vie
    Que quelques jours de mon printemps
    Et quelques baisers d'une amie
    Qui m'ont charmé jusqu'à vingt ans !...

    Salut à toi, ma belle fiancée,
    Qui dans...

  • Sire, de grâce, écoutez-moi :
    Sire, je reviens des galères...
    Je suis voleur, vous êtes roi,
    Agissons ensemble en bons frères.
    Les gens de bien me font horreur,
    J'ai le coeur dur et l'âme vile,
    Je suis sans pitié, sans honneur :
    Ah ! faites-moi sergent de ville.

    Bon ! je me vois déjà sergent :
    Mais, sire, c'est bien peu, je pense.
    ...

  • Frères, de qui toujours la parfaite harmonie
    Règne, sans s'altérer, dans vos vieux différends ;
    Grands corps, de siècle en siècle, affermis en vos rangs,
    Dont tous les autres corps sentent la tyrannie ;

    Éléments séparés, dont la force est unie,
    Fixes, mouvants, légers, pesants, actifs, souffrants,
    Chauds, froids, humides, secs, obscurs et transparents...

  • Riches voûtes d'azur, flambeaux du firmament,
    Couronnes, dignités, grandeurs, pompe royale,
    Festins, concerts, parfums que l'Arabie exhale,
    Jardins, fleuves, palais bâtis superbement ;

    Soleil, du haut lambris le plus noble ornement,
    Perles, rubis, joyaux de l'Inde orientale,
    Trésors que l'Occident aujourd'hui nous étale,
    Éclatantes beautés de ce...