• En te voyant toute mignonne,
    Blanche dans ta robe d'azur,
    Je pensais à quelque madone
    Drapée en un pan de ciel pur ;

    Je songeais à ces belles saintes
    Que l'on voyait, du temps jadis,
    Sourire sur les vitres peintes,
    Montrant du doigt le paradis ;

    Et j'aurais voulu, loin du monde
    Qui passait frivole entre nous,
    Dans quelque...

  • Le doux titre et l'emploi charmant :
    Être, en juin, un berger d'abeilles,
    Lorsque les prés sont des corbeilles
    Et les champs des mers de froment ;

    Quand les faucheurs sur les enclumes
    Martèlent la faux au son clair,
    Et que les oisillons dans l'air
    Font bouffer leurs premières plumes !

    Berger d'abeilles, je le fus,
    A huit ans, la-...

  • Face au midi, bien adossée
    A l'ancien étang féodal
    Dont elle épaule la chaussée,
    Elle fut le moulin banal

    Où deux ou trois pauvres villages
    Et quelques petits mas perdus,
    Avec leurs maigres attelages
    Plusieurs siècles sont descendus

    Moudre, au tic tac vieillot et grêle
    D'un mécanisme trébuchant,
    Tout ce que la dîme ou la grêle
    ...

  • Oui, partout elle est bonne et partout elle est belle,
    Notre terre de France aux mille aspects divers !
    Belle sur les sommets où trônent les hivers,
    Et dans la lande fauve à l'araire rebelle,
    Belle au bord des flots bleus, belle au fond des bois verts !

    Belle et bonne aux coteaux où la vigne s'accroche,
    Et dans la plaine grasse où moutonnent les blés...

  • Laboureur ! - Il n'était, ne voulut jamais être
    Que laboureur ; - un beau laboureur, lent et doux
    Et fort comme ses boeufs, qui l'aimaient entre tous
    Leurs bouviers, et venaient très docilement mettre,
    Dès son premier appel, leurs cornes et leurs cous
    Sous le dur joug en bois de hêtre...

    A vingt ans il dut les quitter, étant conscrit ;
    Mais, libéré,...

  • Vieillir, se l'avouer à soi-même et le dire,
    Tout haut, non pas pour voir protester les amis,
    Mais pour y conformer ses goûts et s'interdire
    Ce que la veille encore on se croyait permis.

    Avec sincérité, dès que l'aube se lève,
    Se bien persuader qu'on est plus vieux d'un jour.
    À chaque cheveu blanc se séparer d'un rêve
    Et lui dire tout bas un adieu...

  • La beauté que je sers, et qui m'est si cruelle,
    Se peut bien appeler un miracle des cieux,
    C'est la peine du coeur, c'est le plaisir des yeux,
    Et le divin objet d'une flamme immortelle.

    La mère des amours ne fut jamais si belle,
    Ses regards sont partout des vainqueurs glorieux ;
    Et sa bouche qui forme un parler gracieux,
    A l'éclat et l'odeur d'une rose...

  • Maître, quand j'entendis, de par tes doigts magiques,
    Vibrer ce grand Nocturne, à des bruits d'or pareil ;
    Quand j'entendis, en un sonore et pur éveil,
    Monter sa voix, parfum des astrales musiques ;

    Je crus que, revivant ses rythmes séraphiques
    Sous l'éclat merveilleux de quelque bleu soleil,
    En toi, ressuscité du funèbre sommeil,
    Passait le grand vol...

  • Dans le soir triomphal la froidure agonise
    Et les frissons divins du printemps ont surgi ;
    L'Hiver n'est plus, vivat ! car l'Avril bostangi,
    Du grand sérail de Flore a repris la maîtrise.

    Certe, ouvre ta persienne, et que cet air qui grise,
    Se mêlant aux reflets d'un ciel pur et rougi,
    Rôde dans le boudoir où notre amour régit
    Avec les sons mourants que...

  • Quand les pastours, aux soirs des crépuscules roux
    Menant leurs grands boucs noirs aux râles d'or des flûtes,
    Vers le hameau natal, de par delà les buttes,
    S'en revenaient, le long des champs piqués de houx ;

    Bohèmes écoliers, âmes vierges de luttes,
    Pleines de blanc naguère et de jours sans courroux,
    En rupture d'étude, aux bois jonchés de brous
    Nous...