• Où allez-vous, Anne ? que je le sache,
    Et m'enseignez avant que de partir
    Comme ferai, afin que mon oeil cache
    Le dur regret du coeur triste et martyr.
    Je sais comment ; point ne faut m'avertir
    Vous le prendrez, ce coeur, je le vous livre ;
    L'emporterez pour le rendre délivre
    Du deuil qu'aurait loin de vous en ce lieu ;
    Et pour autant qu'on ne peut sans...

  • Pour un dizain que gagnâtes mardi,
    Cela n'est rien, je ne m'en fais que rire,
    Et fut très aise alors que le perdis,
    Car aussi bien je voulais vous écrire
    Et ne savais bonnement que vous dire,
    Qui est assez pour se tenir tout coi.
    Or, payez-vous, je vous baille de quoi,
    D'aussi bon coeur que si je le donnaie ;
    Que plût à Dieu que ceux à qui je...

  • J'ai grand désir
    D'avoir plaisir
    D'amour mondaine :
    Mais c'est grand peine,
    Car chaque loyal amoureux
    Au temps présent est malheureux :
    Et le plus fin
    Gagne à la fin
    La grâce pleine.

  • Ci-dessous gît et loge en serre,
    Ce très gentil fallot Jean Serre,
    Qui tout plaisir allait suivant ;
    Et grand joueur de son vivant,
    Non pas joueur de dés, ni quilles,
    Mais de belles farces gentilles,
    Auquel jeu jamais ne perdit,
    Mais y gagna bruit et crédit,
    Amour et populaire estime,
    Plus que d'écus, comme j'estime.

    Il fut en...

  • Celle qui m'a tant pourmené
    A eu pitié de ma langueur :
    Dedans son jardin m'a mené,
    Où tous arbres sont en vigueur.
    Adoncques ne usa de rigueur :
    Si je la baise, elle m'accole ;
    Puis m'a donné son noble coeur,
    Dont il m'est avis que je vole.

    Quand je vis son coeur être mien,
    Je mis toute crainte dehors,
    Et lui dis : " Belle, ce n'est rien...

  • Secourez-moi, ma Dame par amours,
    Ou autrement la Mort me vient quérir.
    Autre que vous ne peut donner secours
    A mon las coeur, lequel s'en va mourir.
    Hélas, hélas, veuillez donc secourir
    Celui qui vit pour vous en grand détresse,
    Car de son coeur vous êtes la maîtresse.

    Si par aimer, et souffrir nuits et jours,
    L'ami dessert ce qu'il vient requérir...

  • (pour le prier de parler au roi)

    Là où savez, sans vous ne puis venir.
    Vous êtes cil qui pouvez subvenir
    Facilement à mon cas et affaire,
    Et des heureux de ce monde me faire,
    Sans qu'aucun mal vous en puisse advenir.

    Quand je regarde, et pense à l'avenir,
    J'ai bon vouloir de sage devenir :
    Mais sans support je ne me puis retraire
    Là où...

  • Je ne t'écris de l'amour vaine et folle :
    Tu vois assez s'elle sert ou affolle ;
    Je ne t'écris ni d'armes, ni de guerre :
    Tu vois qui peut bien ou mal y acquerre ;
    Je ne t'écris de fortune puissante :
    Tu vois assez s'elle est ferme ou glissante ;
    Je ne t'écris d'abus trop abusant :
    Tu en sais prou et si n'en vas usant ;
    Je ne t'écris de Dieu ni sa...

  • Plus ne suis ce que j'ai été,
    Et ne le saurais jamais être.
    Mon beau printemps et mon été
    Ont fait le saut par la fenêtre.
    Amour, tu as été mon maître,
    Je t'ai servi sur tous les Dieux.
    Ah si je pouvais deux fois naître,
    Comme je te servirais mieux !

  • Tout à part soi est mélancolieux
    Le tien servant, qui s'éloigne des lieux,
    Là où l'on veut chanter, danser et rire :
    Seul en sa chambre il va ses pleurs écrire,
    Et n'est possible à lui de faire mieux.

    Car quand il pleut, et le Soleil des Cieux
    Ne reluit point, tout homme est soucieux,
    Et toute bête en son creux se retire
    Tout à part soi.
    ...