• Je ne te conterai de Bologne et Venise,
    De Padoue et Ferrare et de Milan encor,
    De Naples, de Florence, et lesquelles sont or
    Meilleures pour la guerre ou pour la marchandise.

    Je te raconterai du siège de l'Église,
    Qui fait d'oisiveté son plus riche trésor,
    Et qui dessous l'orgueil de trois couronnes d'or
    Couve l'ambition, la haine et la feintise :...

  • A vous, troupe légère,
    Qui d'aile passagère
    Par le monde volez,
    Et d'un sifflant murmure
    L'ombrageuse verdure
    Doucement ébranlez,

    J'offre ces violettes,
    Ces lis et ces fleurettes,
    Et ces roses ici,
    Ces vermeillettes roses,
    Tout fraîchement écloses,
    Et ces oeillets aussi.

    De votre douce haleine
    Éventez cette plaine,...

  • Je fus jadis Hercule, or Pasquin je me nomme,
    Pasquin fable du peuple, et qui fais toutefois
    Le même office encor que j'ai fait autrefois,
    Vu qu'ores par mes vers tant de monstres j'assomme.

    Aussi mon vrai métier, c'est de n'épargner homme,
    Mais les vices chanter d'une publique voix :
    Et si ne puis encor, quelque fort que je sois,
    Surmonter la...

  • Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
    Ou comme cestuy-là qui conquit la toison,
    Et puis est retourné, plein d'usage et raison,
    Vivre entre ses parents le reste de son âge !

    Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village
    Fumer la cheminée, et en quelle saison
    Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
    Qui m'est une province, et beaucoup...

  • Puis m'apparut une pointe aiguisée
    D'un diamant de dix pieds en carré,
    A sa hauteur justement mesuré,
    Tant qu'un archer pourrait prendre visée.

    Sur cette pointe une urne fut posée
    De ce métal sur tous plus honoré :
    Et reposait en ce vase doré
    D'un grand César la cendre composée.

    Aux quatre coins étaient couchés encor
    Pour piédestal...

  • Quand cette belle fleur premièrement je vis,
    Qui notre âge de fer de ses vertus redore,
    Bien que sa grand' valeur je ne connusse encore,
    Si fus-je en la voyant de merveille ravi.

    Depuis, ayant le cours de fortune suivi,
    Où le Tibre tortu de jaune se colore,
    Et voyant ces grands dieux, que l'ignorance adore,
    Ignorants, vicieux et méchants à l'envi...

  • Gordes, il m'est avis que je suis éveillé,
    Comme un qui tout ému d'un effroyable songe
    Se réveille en sursaut et par le lit s'allonge,
    S'émerveillant d'avoir si longtemps sommeillé.

    Roger devint ainsi (ce crois-je) émerveillé :
    Et crois que tout ainsi la vergogne me ronge,
    Comme lui, quand il eut découvert le mensonge
    Du fard magicien qui l'avait...

  • Telle que dans son char la Bérécynthienne
    Couronnée de tours, et joyeuse d'avoir
    Enfanté tant de dieux, telle se faisait voir
    En ses jours plus heureux cette ville ancienne :

    Cette ville, qui fut plus que la Phrygienne
    Foisonnante en enfants, et de qui le pouvoir
    Fut le pouvoir du monde, et ne se peut revoir
    Pareille à sa grandeur, grandeur sinon la...

  • Divins esprits, dont la poudreuse cendre
    Gît sous le faix de tant de murs couverts,
    Non votre los, qui vif par vos beaux vers
    Ne se verra sous la terre descendre,

    Si des humains la voix se peut étendre
    Depuis ici jusqu'au fond des enfers,
    Soient à mon cri les abîmes ouverts
    Tant que d'abas vous me puissiez entendre.

    Trois fois cernant sous le...

  • Je hais plus que la mort un jeune casanier,
    Qui ne sort jamais hors, sinon aux jours de fête,
    Et craignant plus le jour qu'une sauvage bête,
    Se fait en sa maison lui-même prisonnier.

    Mais je ne puis aimer un vieillard voyager,
    Qui court deçà delà, et jamais ne s'arrête,
    Ainsi des pieds moins léger que léger de la tête,
    Ne séjourne jamais non plus qu'un...