• Aux hommes de mon temps je rêve un cœur hanté
    Par quelque grand projet d’envergure superbe,
    Tel que les bons géants qui sommeillent sous l’herbe
    En concevaient aux temps féconds de l’équité.

    Et, prenant mon désir pour la réalité,
    Comme à Lazare mort un jour parla le Verbe,
    Je leur dis : Levez-vous, car voici que la gerbe
    Du froment de justice est mûre...

  • Le front a des blancheurs mates de cire vierge,
    Car il est ignorant des choses du Malin,
    Et l’âme transparaît sous la robe de lin
    Comme à travers l’albâtre une flamme de cierge.

    Le pied, chaussé de vair, de l’arabesque émerge,
    Et la nuque, appuyée au nimbe d’argent fin,
    Se redresse extatique. En marge du vélin
    On lit un nom de reine, Ingeburge ou...

  • Sur l’ais noir incrusté de nacre orientale,
    Lourd comme un rituel du saint rite romain,
    L’armoriai d’Espagne, en double parchemin
    D’Alcoy, relié d’or, tout grand ouvert s’étale.

    Une arabesque bleue aux rinceaux de carmin,
    Plus éclatante qu’un vitrail de cathédrale,
    Sur la première page étire sa spirale
    Autour d’un écusson large comme la main.

    ...

  • Le chemin où je marche est un chemin étroit :
    Les foules ne sont pas ce que l’on y redoute,
    Mais les cèdres puissants lui forment une voûte,
    Un soleil radieux y luit en maint endroit.

    Étant né très-naïf, avec le cœur très-droit,
    Je n’ai jamais trouvé sous mes pas d’autre route ;
    Car, moi, je ne sais rien des tristesses du doute,
    Et l’homme que je suis...