• Je regardais le ciel et je ne voyais
                        que le ciel gris,
    et un oiseau qui volait haut. Je n’entendais
                        pas un seul cri.

    Et l’on aurait dit qu’il ne savait où aller
                        dans le ciel mou,
    et qu’il se laissait tomber, au lieu de voler,
                        comme un caillou.

    Puis il est parti. —...

  • Je sais que tu es pauvre :
    tes robes sont modestes.
    Mine douce, il me reste
    ma douleur : je te l’offre.

    Mais tu es plus jolie
    que les autres, ta bouche
    sent bon — quand tu me touches
    la main, j’ai la folie.

    Tu es pauvre, et à cause
    de cela tu es bonne ;
    tu veux que je te donne
    des baisers et des roses.

    Car tu es jeune...

  • Je songe à ce jour-là où vous me confierez
    votre pudeur pareille au muguet-des-forêts.

  •                                        I

    Je suis dans un pré où coule l’eau froide dans l’herbe,
    le long des cerisiers, sur des joncs, des cailloux.
    Les filles mettront les fleurs du pré vert en gerbes
    pour la procession quand le temps sera doux :
    les fleurs qu’on appelle bouquets faits, les joncs roses.
    Les jeunes filles seront en blanc et, le soir,
    ...

  • Je suis une brebis qui court dans les œillets.
    Elle tremble, et sa voix semble toute mouillée
    Lorsque l’on voit le jour succéder à la nuit :
    Car l’aurore est bien froide avant que la brebis
    Dans le pur arc-en-ciel soit tout ensoleillée…
    Renais, soleil ! Du fond des cirques ténébreux.
    Renaissez, renaissez, Mystères glorieux,
    Par la brebis qui tremble...

  •                                        I

    Je t’aime et ne sais ce que je te voudrais.
    Hier mes jambes douces et claires ont tremblé
    quand ma gorge t’a touché, lorsque je courais.

                                           II

    Moi, le sang a coulé plus fort comme une roue,
    jusqu’à ma gorge, en sentant tes bras ronds et doux
    luire à travers ta robe comme...

  • J’écris dans un vieux kiosque si touffu
    qu’il en est humide et, comme un Chinois,
    j’écoute l’eau du bassin et la voix
    d’un oiseau — là, près de la chute (chutt !!)

    d’eau. Je vais allumer ma pipe.
    Ça y est. J’en égalise la cendre.
    Puis le souvenir doucement descend
    en inspiration poétique.

    « Je suis venu trop tard dans un monde
    ...

  • J’étais gai et l’église était calme au soleil,
    près des jardins où sous la vigne il y a des roses,
    près de la route où les oies et les canards causent,
    les belles oies qui sont blanches comme du sel.

    Sainte-Suzanne est le nom du petit village :
    c’est un nom doux ainsi qu’un vieux nom de grand-mère.
    L’auberge est pleine de fumée et de gros verres.
    Les...

  •  
    La jeune fille est blanche,
    elle a des veines vertes
    aux poignets, dans ses manches
            ouvertes.

    On ne sait pas pourquoi
    elle rit. Par moment
    elle crie et cela
            est perçant.

    Est-ce qu'elle se doute
    qu'elle vous prend le cœur
    en cueillant sur la route
            des fleurs ?

    On dirait quelquefois
    ...

  • La jeune fille un peu souffrante me sourit
                et me dit : vous croyez ?
    Elle est en innocence et porte une petite
                bague d’argent tressé.

    Je vois tout près de moi ce petit corps si faible
                et je me penche en souriant
    vers cette enfant et lui dis : mademoiselle,
                qu’est devenue la supérieure du couvent ?

    ...