• (Études latines, I)

    La Jeunesse nous quitte, et les Grâces aussi.
    Les Désirs amoureux s'envolent avec elles,
    Et le sommeil facile. À quoi bon le souci
    Des espérances éternelles ?

    L'aile du vieux Saturne emporte nos beaux jours,
    Et la fleur inclinée au vent du soir se fane ;
    Viens à l'ombre des pins ou sous l'épais platane
    Goûter les...

  • Les moines, à pas lents, derrière le Prieur
    Qui portait le ciboire et les huiles mystiques,
    Rentrèrent, deux à deux, au cloître intérieur,
    Troupeau d'ombres, le long des arcades gothiques.

    Comme en un champ de meurtre, après l'ardent combat,
    Le silence se fit dans la morne cellule,
    Autour du vieil Abbé couché sur son grabat,
    Rigide, à la lueur de...

  • Sentiers furtifs des bois, sources aux frais rivages,
    Et vous, grottes de pampre où glisse un jour vermeil,
    Platanes, qui voyez, sous vos épais feuillages,
    Les vierges de l'Hybla céder au doux sommeil ;

    Un Dieu ne m'endort plus dans vos calmes retraites,
    Quand midi rayonnant brûle les lourds rameaux.
    Ecoutez, ô forêts, mes tristesses secrètes !
    Versez...

  • Kastalides ! chantez l'enfant aux brunes tresses,
    Dont la peau lisse et ferme a la couleur du miel,
    Car vous embellissez la louange, ô Déesses !

    Autour de l'onde où croît le laurier immortel
    Chantez Péristèris née au rocher d'Egine :
    Moins chère est à mes yeux la lumière du ciel !

    Dites son rire frais, plus doux que l'aubergine,
    Le rayon d'or qui...

  • (Études latines, VII)

    Enfant, pour la lune prochaine,
    Pour le convive inattendu !
    Votre amant, Muses, peut sans peine
    Tarir la coupe neuf fois pleine ;
    Mais les Grâces l'ont défendu.

    Inclinez les lourdes amphores,
    Effeuillez la rose des bois !
    Anime tes flûtes sonores,
    Ô Bérécinthe, et ce hautbois !
    C'est à Glycère que je...

  • Au déclin des grandeurs qui dominent la terre
    Quand les cultes divins, sous les siècles ployés,
    Reprenant de l'oubli le sentier solitaire,
    Regardent s'écrouler leurs autels foudroyés ;

    Quand du chêne d'Hellas la feuille vagabonde
    Des parvis désertés efface le chemin
    Et qu'au delà des mers, où l'ombre épaisse abonde,
    Vers un jeune soleil flotte l'esprit...

  • L'orbe d'or du soleil tombé des cieux sans bornes
    S'enfonce avec lenteur dans l'immobile mer,
    Et pour suprême adieu baigne d'un rose éclair
    Le givre qui pétille à la cime des mornes.

    En un mélancolique et languissant soupir,
    Le vent des hauts, le long des ravins emplis d'ombres,
    Agite doucement les tamariniers sombres
    Où les oiseaux siffleurs...

  • Ta demeure est au bord des océans antiques,
    Maître ! Les grandes Eaux lavent tes pieds mystiques.

    Sur ta face divine et ton dos écumant
    L'Abîme primitif ruisselle lentement.
    Tes cheveux qui brûlaient au milieu des nuages,
    Parmi les rocs anciens déroulés sur les plages,
    Pendent en noirs limons, et la houle des mers
    Et les vents infinis gémissent au...

  • Dans le Vide éternel interrompant son rêve,
    L'Être unique, le grand Taaroa se lève.
    Il se lève, et regarde : il est seul, rien ne luit.
    Il pousse un cri sauvage au milieu de la nuit :
    Rien ne répond. Le temps, à peine né, s'écoule ;
    Il n'entend que sa voix. Elle va, monte, roule,
    Plonge dans l'ombre noire et s'enfonce au travers.
    Alors, Taaroa se change en...

  • Dompteur à peine né, qui tuais dans tes langes
    Les Dragons de la Nuit ! Coeur-de-Lion ! Guerrier,
    Qui perças l'Hydre antique au souffle meurtrier
    Dans la livide horreur des brumes et des fanges,
    Et qui, sous ton oeil clair, vis jadis tournoyer
    Les Centaures cabrés au bord des précipices !
    Le plus beau, le meilleur, l'aîné des Dieux propices !
    Roi purificateur...