• Le bon maître huchier, pour finir un dressoir,
    Courbé sur l'établi depuis l'aurore ahane,
    Maniant tour à tour le rabot, le bédane
    Et la râpe grinçante ou le dur polissoir.

    Aussi, non sans plaisir, a-t-il vu, vers le soir,
    S'allonger jusqu'au seuil l'ombre du grand platane
    Où madame la Vierge et sa mère sainte Anne
    Et Monseigneur Jésus près de lui...

  • Avec la brise en poupe et par un ciel serein,
    Voyant le Phare fuir à travers la mâture,
    Il est parti d'Egypte au lever de l'Arcture,
    Fier de sa nef rapide aux flancs doublés d'airain.

    Il ne reverra plus le môle Alexandrin.
    Dans le sable où pas même un chevreau ne pâture
    La tempête a creusé sa triste sépulture ;
    Le vent du large y tord quelque arbuste...

  • Une brusque clameur épouvante le Gange.
    Les tigres ont rompu leurs jougs et, miaulants,
    Ils bondissent, et sous leurs bonds et leurs élans
    Les Bacchantes en fuite écrasent la vendange.

    Et le pampre que l'ongle ou la morsure effrange
    Rougit d'un noir raisin les gorges et les flancs
    Où près des reins rayés luisent des ventres blancs
    De léopards roulés...

  • Que vos astres plus clairs gardent mieux du danger,
    Dioscures brillants, divins frères d'Hélène,
    Le poète latin qui veut, au ciel hellène,
    Voir les Cyclades d'or de l'azur émerger.

    Que des souffles de l'air, de tous le plus léger,
    Que le doux lapyx, redoublant son haleine,
    D'une brise embaumée enfle la voile pleine
    Et pousse le navire au rivage...

  • Et partout devant lui, par milliers, les oiseaux,
    De la berge fangeuse où le Héros dévale,
    S'envolèrent, ainsi qu'une brusque rafale,
    Sur le lugubre lac dont clapotaient les eaux.

    D'autres, d'un vol plus bas croisant leurs noirs réseaux,
    Frôlaient le front baisé par les lèvres d'Omphale,
    Quand, ajustant au nerf la flèche triomphale,
    L'Archer superbe fit...

  • Le temple est en ruine au haut du promontoire.
    Et la Mort a mêlé, dans ce fauve terrain,
    Les Déesses de marbre et les Héros d'airain
    Dont l'herbe solitaire ensevelit la gloire.

    Seul, parfois, un bouvier menant ses buffles boire,
    De sa conque où soupire un antique refrain
    Emplissant le ciel calme et l'horizon marin,
    Sur l'azur infini dresse sa forme...

  • Tel que Delphes l'a vu quand, Thymos le suivant,
    Il volait par le stade aux clameurs de la foule,
    Tel Ladas court encor sur le socle qu'il foule
    D'un pied de bronze, svelte et plus vif que le vent.

    Le bras tendu, l'oeil fixe et le torse en avant,
    Une sueur d'airain à son front perle et coule ;
    On dirait que l'athlète a jailli hors du moule,
    Tandis que...

  • Pour me conduire au Raz, j'avais pris à Trogor
    Un berger chevelu comme un ancien Évhage ;
    Et nous foulions, humant son arome sauvage,
    L'âpre terre kymrique où croît le genêt d'or.

    Le couchant rougissait et nous marchions encor,
    Lorsque le souffle amer me fouetta le visage ;
    Et l'homme, par-delà le morne paysage
    Étendant un long bras, me dit :...

  • Seigneur de Rimini, Vicaire et Podestà.
    Son profil d'épervier vit, s'accuse ou recule
    A la lueur d'airain d'un fauve crépuscule,
    Dans l'orbe où Matteo de' Pastis l'incrusta.

    Or, de tous les tyrans qu'un peuple détesta,
    Nul, comte, marquis, duc, prince ou principicule,
    Qu'il ait nom Ezzelin, Can, Galéas, Hercule,
    Ne fut maître si fier que le...

  • I

    Midi. L'air brûle et sous la terrible lumière
    Le vieux fleuve alangui roule des flots de plomb ;
    Du zénith aveuglant le jour tombe d'aplomb,
    Et l'implacable Phré couvre l'Égypte entière.

    Les grands sphinx qui jamais n'ont baissé la paupière,
    Allongés sur leur flanc que baigne un sable blond,
    Poursuivent d'un regard mystérieux et long
    ...