• Partout la neige. Au bout du sinistre chemin
    Que troublait seul le bruit de ce pas surhumain,
    C'était un bois sauvage éclairé par la lune.
    Pas une seule place où la terre fût brune,
    Et, pareil à ce voile effrayant qui descend
    Au pied des morts, le blanc linceul éblouissant
    Faisait tomber ses plis sur les chênes énormes,
    Et le vent furieux, engouffré...

  •  
    Elle cueille des marguerites et les effeuille pour s’assurer de l’amour de Loys.
    Théophile Gautier, Giselle, acte I, scène IV.

    Mon Loys, j’ai sous vos prunelles,
    Oublié, dans mon cœur troublé,
    Mon époux qui s’en est allé
    Pour combattre les infidèles.
    Quand nous le croirons loin encor,
    Il sera là, Dieu nous pardonne !...

  •  
    Qui faut-il plaindre, ceux qui meurent
    ou ceux qui combattent ? Sans doute, c’est triste
    de voir un poète de vingt ans qui s’en va, une
    lyre qui se brise, un avenir qui s’évanouit ;
    mais n’est-ce pas quelque chose aussi que le repos ?
    Victor Hugo, Littérature et Philosophie mêlées.

    Ce que je veux rimer, c’est un conte en...

  •  

    Le Carnaval s’amuse !
    Viens le chanter, ma Muse,
    Sur un rhythme gaillard
    Du bon Ronsard !

    Et d’abord, sur ta nuque,
    En dépit de l’eunuque,
    Fais flotter tes cheveux
    Libres de...

  •  

    Même en deuil pour cent trahisons,
    À vos soleils nous embrasons
    Nos cœurs meurtris, jeunes saisons !

    Ô premières roses trémières !
    Ô premières amours ! Premières
    Aurores, aux riches lumières !

    Malgré l’hiver et les autans,
    Ressuscitent, vainqueurs du temps,
    Vos étés aux cheveux flottants !

  • Une nuit, j'ai rêvé que l'Amour était mort.
    Au penchant de l'Œta, que l'âpre bise mord,
    Les Vierges dont le vent meurtrit de ses caresses
    Les seins nus et les pieds de lys, les chasseresses
    Que la lune voit fuir dans l'antre souterrain,
    L'avaient toutes percé de leurs flèches d'airain.
    Le jeune Dieu tomba, meurtri de cent blessures,
    Et le sang...

  •  

    Le Poète sentant son âme ouvrir ses ailes
             Pour s’envoler enfin,
    S’enchantait de gravir les cimes éternelles
             Et de n’avoir plus faim.

    Des souvenirs confus et des heures fanées
             Où l’espoir avait lui,
    Comme des compagnons de ses jeunes années
             Se groupaient devant lui.

    Il revoyait le temps où, dans la...

  •  
    Près du ruisseau, sous la feuillée,
    Menons la Muse émerveillée
    Chanter avec le doux roseau,
    Puisque la Muse est un oiseau.

    Puisque la Muse est un oiseau,
    Gardons que quelque damoiseau
    N'apprenne ses chansons nouvelles
    Pour aller les redire aux belles.

    Un méchant aux plus fortes ailes
    Tend mille pièges infidèles.
    Gardons-la...

  •  
          Près de la pierre close
          Sous laquelle repose
          Théophile Gautier,
               (Non tout entier,

          Car par son œuvre altière
          Ce dompteur de matière
          Est comme auparavant
               Toujours vivant,)

          Regardant cette tombe
          De leurs yeux de colombe,
          Les Muses vont pleurant...

  • Dans la vallée où passe une haleine embaumée,
    Hercule combattait le lion de Némée.
    Rampant, agile et nu, parmi les gazons ras,
    Parfois il étreignait le monstre dans ses bras,
    Puis le fuyait ; et, plein de fureur et de joie,
    Par un bond effrayant revenait sur sa proie.
    Au loin sur les coteaux et dans les bois dormants
    On entendit leurs cris et leurs...