• Un monsieur à lunettes faisant le bonheur d’une femme

    Arqué sur ses talons le notaire instrumente,
    Et fout du ventre au front sa femme et sa servante.

  •  

    On donnait à Favart Mosé. Tamburini,
    Le basso cantante, le ténor Rubini,
    Devaient jouer tous deux dans la pièce ; et la salle
    Quand on l’eût élargie et faite colossale,
    Grande comme Saint-Charle ou comme la Scala,
    N’aurait pu contenir son public ce soir-là.
    Moi, plus heureux que tous, j’avais tout à connaître,
    Et la voix des chanteurs...

  • Quand vous vîntes dimanche, en déesse parée,
    Avec tous vos rayons éblouir votre cour,
    Chacun disait, voyant ce buste au pur contour :
    « C’est Vénus de Milo d’une robe accoutrée ! »

    Mais votre épaule était d’un trait rouge effleurée :
    Tel le ramier blanc saigne aux serres de l’autour,
    Telle rosit la neige aux premiers feux du jour ;
    Le carmin s’y...

  • Elle est morte pour moi, dans la tombe glacée
    Comme si le trépas l’avait déjà placée ;
    Elle vit cependant, ange exilé des cieux,
    Vrai rêve de poète, étrange et gracieux ;
    C’est bien elle toujours, elle que j’ai connue
    Au sortir de l’enfance, à quinze ans, ingénue,
    Folâtre, insouciante, ignorant sa beauté,
    S’ignorant elle-même, et jetant de côté,...

  • J’ai fait une remarque hier en te quittant.
    Sans doute j’ai mal vu ; mais quand on aime tant
    On a peur ; on se fait avec la moindre chose
    Un sujet de tourments. On veut savoir la cause
    De chaque effet. Un mot, un geste, une ombre, un rien,
    La plus folle chimère, un souvenir ancien
    Qui dormait dans un coin du cœur et qui s’éveille,
    Tout vous effraie....

  • Je voudrais l’oublier, ou ne pas la connaître…
    Oh, si j’avais pensé que dans mon cœur dût naître
    Ce feu qui le dévore et qui ne s’éteint pas,
    Loin d’elle encore à temps j’aurais porté mes pas…
    Mais non, il le fallait ; c’était ma destinée !
    Contre elle vainement dans mon âme indignée
    Je crie et me révolte ; il le fallait. Le soir,
    À l’ombre des...

  • Pendant les guerres de l’Empire,
    Gœthe, au bruit du canon brutal,
    Fit Le Divan occidental,
    Fraîche oasis où l’art respire.

    Pour Nisami quittant Shakspeare,
    Il se parfuma de santal,
    Et sur un mètre oriental
    Nota le chant qu’Hudhud soupire.

    Comme Gœthe sur son divan
    À Weimar s’isolait des choses
    Et d’Hafiz effeuillait les...

  • Oui, c’est une montée âpre, longue et poudreuse,
    Un revers décharné, vrai site de chartreuse.
    Les pierres du chemin, qui croulent sous les pieds,
    Trompent à chaque instant les pas mal appuyés.
    Pas un brin d’herbe vert, pas une teinte fraîche ;
    On ne voit que des murs bâtis en pierre sèche,
    Des groupes contrefaits d’oliviers rabougris
    Au feuillage...

  • Nous avions avec nous une jeune Espagnole,
    À l’allure hardie, à la toilette folle,
    Au grand front éclatant comme un marbre poli,
    Où la réflexion n’a jamais fait un pli,
    Encadré de cheveux qui venaient en désordre
    Sur un col satiné nonchalamment se tordre ;
    Des sourcils de velours avec de grands yeux noirs
    Renvoyant des éclairs comme un piège à miroirs...

  • Qu’est-ce que le tombeau ? — Le vestiaire où l’âme,
    Au sortir du théâtre et son rôle joué,
    Dépose ses habits d’enfant, d’homme ou de femme,
    Comme un masque qui rend un costume loué !