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    C’est tout mystère et tout secret et toutes portes
    S’ouvrant un peu sur un commencement de soir ;
    La goutte de soleil dans un diamant noir ;
    Et l’éclair vif qu’ont les bijoux des reines mortes.

    Une forêt de mâts disant la mer ; des hampes
    Attestant des drapeaux qui n’auront pas été ;
    Rien qu’une rose pour suggérer des roses thé ;
    Et des jets d...

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    C’était toute douceur et nuance et sourdine
    De lys purs qui seraient sensitives, et d’une
    Figure de clarté qui serait clair de lune,
    Figure de Béguine ou de Visitandine.

    C’était tout falbalas et brumes en écharpes ;
    C’était toute musique, en pleurs d’être charnelle ;
    Et frissons d’une harpe qui serait une aile ;
    Car les ailes du cygne ont la...

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    Premier amour ! Parfum de la nouvelle rose !
    Sur le clavier du cœur premiers accords plaqués
    Par une main de femme insaisissable et rose ;
    Premiers souffles du vent sur la voile morose
    Qui devine la mer dans le calme des quais.

    Premières floraisons dans le verger de l’âme,
    Premiers jets d’eau montant au milieu des jardins
    Où des noces en blanc...

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    I

    Aux jours pascals, quand le ciel est d’azur,
    — Ô cet azur d’avril qui n’est pas encor sûr ! ―
    Apparaissent les Premières Communiantes,
    Cloches de mousseline,
    Robes bouffantes
    Qui cheminent…

    Elles vont, cloches d’innocence,
    En de si blancs, si vaporeux atours !
    Elles ont l’air de rentrer d’une absence,
    De sortir d’une tour...

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    Communiantes ― l’air de porter un secret !
    Vaporeuses, en falbalas de mousselines,
    Avec des yeux un peu comme des cornalines,
    Et leur bouche œillet sur lequel il pleuvait ;

    Elles vont vers Jésus comme on va vers la vie…
    Des berlines aux portières armoriées
    Les mènent comme de petites mariées,
    Sous le voile dont la blancheur les unifie.

    ...

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    Où sont les jours d’hiver pleins de calme infini
    Dans la salle d’étude, aux carreaux blanc de givre ;
    Et les grands abat-jour sur les lampes de cuivre
    Comme autour d’une lune un halo d’or bruni.

    Quel éveil dans nos cœurs quand le soir, en sourdine,
    Chuchotait sa tristesse aux fentes des châssis
    Et que, sur les bancs noirs pensivement assis,
    ...

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    J’évoque aussi parfois la grande chambre ancienne
    Où nous allions prier pendant les soirs de mai ;
    Comme pour la chaleur on ouvrait la persienne
    L’âme des fleurs passait dans le vent embaumé.

    Une madone blonde ornait la cheminée
    Montrant des doigts son cœur traversé d’un couteau ;
    Des chandeliers d’argent l’avaient illuminée
    Et donnaient de la...

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    Le soir tombe : prions pour les pauvres malades.

    Je songe à ceux qui sont dans leur chambre, reclus
    Les paralytiques, les perclus,
    Ceux qui ne sortiront jamais plus.

    Le soir tombe : prions pour les pauvres malades.

    Pour les irrémédiables phtisiques
    Qui rêvent de candide amour, d’émois physiques,
    Et d’un mariage en musique....

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    I

    Blanches processions, si blanches, si gothiques,
    Dans ma Flandre natale, au temps des Fêtes-Dieu !
    Blanches comme on en voit, sous un ciel calme et bleu
    Emplir de leur lenteur les lointains des triptyques.

    Si lentes, dans le bruit des cloches s’animant,
    Le bruit des carillons et des cloches bénies
    Qui semblaient tout au loin répondre aux...

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    Combien mélancolique était la promenade
    Trois par trois, en automne, aux fins d’après-midi,
    Lorsque nous traversions un faubourg engourdi
    Où sortait des maisons pauvres une odeur fade.
     
    En longue file noire et morne, nous allions
    Comme enrégimentés et nous parlant à peine
    A travers la banlieue isolée et malsaine
    Ecoutant dans le soir...