• Plaisir, bourreau des cœurs, vendeur juré des âmes,
    Ah ! trop longtemps tu pris le masque de l’amour
    Au vestiaire impur des romans et des drames !

    Voyageant sous son nom et suivi par ta cour
    De Lovelaces fous et de Phèdres navrées,
    Plaisir, tyran cruel, voici venir ton tour !

    Ah ! trop longtemps tu fis, dans tes mornes Caprées,
    Des corps humains...

  • Si, tous les matins de nos fêtes,
    Nous chantions tous avec amour
    Sur les harpes des saints prophètes
    Nos prières qui sont parfaites,
    Je ne serais pas dans la cour.

    Si nous récitions nos prières
    Dans le crépuscule du soir
    Avec des lèvres régulières,
    Avant d'allumer les lumières,
    Je ne serais pas au chauffoir.

    Si les yeux...

  • Oh ! peindre tes cheveux du bleu de la fumée,
    Ta peau dorée et d'un ton tel qu'on croit voir presque
    Une rose brûlée ! et ta chair embaumée,
    Dans des grands linges d'ange, ainsi qu'en une fresque,

    Qui font plus brun ton corps gras et fin de mauresque,
    Qui fait plus blanc ton linge et ses neiges d'almée,
    Ton front, tes yeux, ton nez et ta lèvre pâmée...

  • Alors, si l'homme est juste et si le monde est sage,
    Offrant tout à Jésus, sa joie et ses douleurs,
    Ceux-là, dont le poète apporte un doux message,
    Viendront comme un bel arbre épanouit ses fleurs.

    Alors, si l'Homme est sage et si la Vierge est forte,
    Tous les enfants divins du royaume charmant
    Dont l'esprit du poète entrebâille la porte,
    Tous les...

  • Dieu fit votre corps noble et votre âme charmante.
    Le corps sort de la terre et l'âme aspire aux cieux ;
    L'un est un amoureux et l'autre est une amante.

    Dans la paix d'un jardin vaste et délicieux,
    Dieu souffla dans un peu de boue un peu de flamme,
    Et le corps s'en alla sur ses pieds gracieux.

    Et ce souffle enchantait le corps, et c'était l'âme...

  • Souvenez-vous des humbles cimetières
    Que voile aux villages voisins
    Le pli d'un coteau pâle où pendent les raisins,
    Qu'éveille, au point du jour, l'air du casseur de pierres.
    Seuls, les vieux fossoyeurs ont d'eux quelque souci.
    Et c'est à peine si -
    Comme des brebis étonnées,
    Loin du troupeau fumant des douces cheminées,
    Loin du clocher, ce pâtre...

  • I

    Aimez bien vos amours ; aimez l'amour qui rêve
    Une rose à la lèvre et des fleurs dans les yeux ;
    C'est lui que vous cherchez quand votre avril se lève,
    Lui dont reste un parfum quand vos ans se font vieux.

    Aimez l'amour qui joue au soleil des peintures,
    Sous l'azur de la Grèce, autour de ses autels,
    Et qui déroule au ciel la tresse et les...

  • Je porte un nom assez... bizarre,
    Tu diras : " Ton cas n'est pas rare. "
    Oh !... je ne pose pas pour ça,
    Du tout... Mais... permettez, Madame,
    Je découvre en son anagramme :
    'Amour ingénue', et puis : 'Va' !

    Si... comme un régiment qu'on place
    Sous le feu... je change la face...
    De ce nom... drôlement venu,
    Dans le feu sacré qui le dore...

  • Au plus haut point de la montagne la plus pure,
    Au plus beau jour de nos époques favorites
    Où le désert se fleurissait de nouveaux rites,
    A l'heure d'or la plus sévère à la nature ;

    Blanche et les flancs pressés d'une longue ceinture,
    Debout dans l'idéal concert de ses mérites,
    La plus sainte et la plus charmante des ermites
    Lève au ciel ses bras...

  • Au marché de Saint-Paul j'irai,
    Ma petite et je te vendrai.
    Je vendrai tes yeux effrontés
    Cent beaux écus fort bien comptés.

    Et je vendrai tes doigts rusés,
    Ces oiseaux mal apprivoisés,
    Et ta lèvre qui toujours ment
    Quatre-vingts doublons seulement.

    Je vendrai tes bras fins et longs
    Et les roses de tes talons,
    De tes genoux...