•  

    Peuple orageux qui des antres sauvages
                   Sort en fureur,
    De toutes parts nous semons les ravages
                   Et la terreur.

    Allez, nous dit le Dieu qui nous déchaîne,
                   Et nous allons.
    Comme un roseau nous abattons le chêne
                   Dans les vallons.

    Des vastes mers qui séparent les mondes...

  •  
    Ils avaient tout un jour, assidus à leur tâche,
    Travaillé du marteau, du rabot, de la hache :
    Charpentiers d’aventure, ils rajustaient le flanc
    De leur chaloupe usée, au pont mince et branlant,
    Qui hors du flot gisait. — Hélas ! la chère barque
    Des injures du temps montrait plus d’une marque.
    Eux sur chaque blessure étendaient le goudron ;
    Ils...

  • Nous sommes les vagues profondes
    Où les yeux plongent vainement ;
    Nous sommes les flots et les ondes
    Qui déroulent autour des mondes
    Leur manteau d’azur écumant !

    Une âme immense en nous respire,
    Elle soulève notre sein.
    Soue l’aquilon, sous le zéphyre,

    Nous sommes la plus vaste lyre
    Qui chante un hymne au trois fois Saint !

    ...

  •  
    Pourquoi, d’une vague implacable,
    Vieil Océan, viens-tu toujours
    Battre de ta prison de sable
    Les indestructibles contours ?
    Ta perds ton temps, tu perds ta peine ;
    Ne vois-tu pas que cette arène
    A ta colère sert de frein ?
    Que ta viens t’épuiser contre elle
    Comme un enfant dont la main frêle
    Heurterait des barreaux d’airain ?

    ...
  • Des terrains sans culture, où les chèvres du pâtre
    Achèvent un gazon que le mistral brûla,
    Des bois de pins, rampant sur la roche marâtre,
    Et de pauvres maisons dont la pierre grisâtre
    S’écaille au vent de mer, — Endoume, te voilà !

    Cependant, plus qu’un sol prodigue de merveilles,
    Plus qu’un jardin riant au printemps bienvenu,
    Plus que les doux...

  • « O vents, disaient les flots, quand nous laisserez-vous
    Dormir à notre gré d’un sommeil large et doux ?
    Trêve à la fin, trêve d’orages !
    Laissez-nous refléter dans notre clair miroir
    Les matins rayonnants, les nuits belles à voir,
    ...

  • I

    « C’est trop longtemps errer ! Par ces champs, par ces bois,
    Par ces monts, où toi seule, ô Diane ! me vois,
    C’est marcher trop longtemps, appesanti par l’âge.
    A quoi me sert d’ailleurs cet éternel voyage ?
    Que sert de visiter sans cesse d’autres lieux,
    A qui porte la nuit dans le pli de ses yeux ?
    ...

  • Reste ainsi, ne fais pas un geste,
    Ne quitte pas ton escabeau ;
    Poursuis ta besogne modeste,
    A côté d’un pâle flambeau.

    Mon cœur est plein, mon œil se mouille,
    Lorsque, seule et baissant les yeux,
    Je te vois filer ta quenouille
    A ce foyer silencieux.

    Les obscures vertus de l’âme,
    Le dévoûment et la bonté,
    Prêtent au front de l’...

  • Nos patriam fugimus. (VIRGILE.)
    Le navire à son flanc met l’escalier mobile.
    Il attend près du môle, en dehors de la ville,
    Les hôtes inconnus qui, rangés sous ses mâts,
    S’en iront, dès ce soir, vers de lointains climats.
    Le long du quai bruyant où s’alignent les poupes,
    Ils arrivent en hâte et réunis par groupes.
    Étranges voyageurs ! Les destins peu...

  • RENCONTRE

    Il est, aux bords déserts du canal Mozambique,
    Une lisière étroite aux pentes du rocher,
    Un rivage sans nom, d’aspect morne et tragique,
    Dont les vaisseaux en mer n’osent pas s’approcher.

    Gomme un rideau tendu, la montagne l’ombrage ;
    Jusqu’au niveau de l’onde, abrupte, elle descend.
    Qui s’égare par là...