• Hélas ! la chimère s'envole
    Et l'espoir ne m'est plus permis ;
    Mais je défends qu'on me console.

    Ne me plaignez pas, mes amis.
    J'aime ma peine intérieure
    Et l'accepte d'un coeur soumis.

    Ma part est encor la meilleure,
    Puisque mon amour m'est resté ;
    Ne me plaignez pas si j'en pleure.

    A votre lampe, aux soirs d'été,
    Les...

  • Je n'ai jamais compris l'ambition. Je pense
    Que l'homme simple trouve en lui sa récompense,
    Et le modeste sort dont je suis envieux,
    Si je travaille bien et si je deviens vieux,
    Sans que mon coeur de luxe ou de gloire s'affame,
    C'est celui d'un vieil homme avec sa vieille femme,
    Aujourd'hui bons rentiers, hier petits marchands,
    Retirés tout au bout du...

  • Hors du coffret de laque aux clous d'argent, parmi
    Les fleurs du tapis jaune aux nuances calmées,
    Le riche et lourd collier qu'agrafent deux camées,
    Ruisselle et se répand sur la table à demi.

    Un oblique rayon l'atteint. L'or a frémi.
    L'étincelle s'attache aux perles parsemées,
    Et midi darde moins de flèches enflammées
    Sur le dos somptueux d'un...

  • Ce serait sur les bords de la Seine. Je vois
    Notre chalet, voilé par un bouquet de bois.
    Un hamac au jardin, un bateau sur le fleuve.
    Pas d'autre compagnon qu'un chien de Terre-Neuve
    Qu'elle aimerait et dont je serais bien jaloux.
    Des faïences à fleurs pendraient après des clous ;
    Puis beaucoup de chapeaux de paille et des ombrelles.
    Sous leurs papiers...

  • Chère âme, si l'on voit que vous plaignez tout bas
    Le chagrin du poète exilé qui vous aime,
    On raillera ma peine, et l'on vous dira même
    Que l'amour fait souffrir, mais que l'on n'en meurt pas.

    Ainsi qu'un mutilé qui survit aux combats,
    L'amant désespéré qui s'en va, morne et blême,
    Loin des hommes qu'il fuit et de Dieu qu'il blasphème,
    N'aimerait-il...

  • A Paris, en été, les soirs sont étouffants.
    Et moi, noir promeneur qu'évitent les enfants,
    Qui fuis la joie et fais, en flânant, bien des lieues,
    Je m'en vais, ces jours-là, vers les tristes banlieues.
    Je prends quelque ruelle où pousse le gazon
    Et dont un mur tournant est le seul horizon.
    Je me plais dans ces lieux déserts où le pied sonne,
    Où je suis...

  • Sur le terrain de foire, au grand soleil brûlé,
    Le cirque des chevaux de bois s'est ébranlé
    Et l'orgue attaque l'air connu : " Tant mieux pour elle ! "
    Mais la brune grisette a fermé son ombrelle,
    Et, bien en selle, avec un petit air vainqueur,
    Elle va se payer deux sous de mal de coeur.
    Elle rit, car déjà le mouvement rapide
    Colle ses frisons noirs sur son...

  • Je suis un pâle enfant du vieux Paris, et j'ai
    Le regret des rêveurs qui n'ont pas voyagé.
    Au pays bleu mon âme en vain se réfugie,
    Elle n'a jamais pu perdre la nostalgie
    Des verts chemins qui vont là-bas, à l'horizon.
    Comme un pauvre captif vieilli dans sa prison
    Se cramponne aux barreaux étroits de sa fenêtre
    Pour voir mourir le jour et pour le voir...

  • Le soir, au coin du feu, j'ai pensé bien des fois
    À la mort d'un oiseau, quelque part, dans les bois.
    Pendant les tristes jours de l'hiver monotone,
    Les pauvres nids déserts, les nids qu'on abandonne,
    Se balancent au vent sur un ciel gris de fer.
    Oh ! comme les oiseaux doivent mourir l'hiver !
    Pourtant, lorsque viendra le temps des violettes,
    Nous ne...

  • J'adore la banlieue avec ses champs en friche
    Et ses vieux murs lépreux, où quelque ancienne affiche
    Me parle de quartiers dès longtemps démolis.
    Ô vanité ! Le nom du marchand que j'y lis
    Doit orner un tombeau dans le Père-Lachaise.
    Je m'attarde. Il n'est rien ici qui ne me plaise,
    Même les pissenlits frissonnant dans un coin.
    Et puis, pour regagner les...