• Il est aisé de plaire à qui veut plaire.
    D'un ignorant un bavard écouté,
    D'un journaliste un rimailleur vanté,
    Sans nulle peine y trouvent leur affaire.
    Louer un sot, c'est pure charité.

    Une Araminte à demi centenaire
    Dans son miroir voit un portrait flatté.
    De nos bas bleus si l'éloge est à faire,
    Il est aisé.

    Mais, s'il faut...

  • Il ne faudrait pourtant, me disais-je à moi-même,
    Qu'une permission de notre seigneur Dieu,
    Pour qu'il vînt à passer quelque femme en ce lieu.
    Les bosquets sont déserts ; la chaleur est extrême ;
    Les vents sont à l'amour l'horizon est en feu ;
    Toute femme, ce soir, doit désirer qu'on l'aime.

    S'il venait à passer, sous ces grands marronniers,
    Quelque...

  • De ta source pure et limpide
    Réveille-toi, fleuve argenté ;
    Porte trois mots, coursier rapide :
    Amour, patrie et liberté !

    Quelle voile, au vent déployée,
    Trace dans l'onde un vert sillon ?
    Qui t'a jusqu'à nous envoyée ?
    Quel est ton nom, ton pavillon ?

    - J'ai porté la céleste flamme
    En tous lieux où Dieu l'a permis.
    Mon...

  • Pépa, quand la nuit est venue,
    Que ta mère t'a dit adieu ;
    Que sous ta lampe, à demie nue,
    Tu t'inclines pour prier Dieu ;

    A cette heure où l'âme inquiète
    Se livre au conseil de la nuit ;
    Au moment d'ôter ta cornette
    Et de regarder sous ton lit ;

    Quand le sommeil sur ta famille
    Autour de toi s'est répandu ;
    O Pépita, charmante fille...

  • Ami, tu l'as bien dit : en nous, tant que nous sommes,
    Il existe souvent une certaine fleur
    Qui s'en va dans la vie et s'effeuille du coeur.
    "Il existe, en un mot, chez les trois quarts des hommes,
    Un poète mort jeune à qui l'homme survit."
    Tu l'as bien dit, ami, mais tu l'as trop bien dit.

    Tu ne prenais pas garde, en traçant ta pensée,
    Que ta plume en...

  • (extrait)

    Pâle étoile du soir, messagère lointaine,
    Dont le front sort brillant des voiles du couchant,
    De ton palais d'azur, au sein du firmament,
    Que regardes-tu dans la plaine ?

    La tempête s'éloigne, et les vents sont calmés.
    La forêt, qui frémit, pleure sur la bruyère ;
    Le phalène doré, dans sa course légère,
    Traverse les prés embaumés....

  • Avec tout votre esprit, la belle indifférente,
    Avec tous vos grands airs de rigueur nonchalante,
    Qui nous font tant de mal et qui vous vont si bien,
    Il n'en est pas moins vrai que vous n'y pouvez rien.

    Il n'en est pas moins vrai que, sans qu'il y paraisse,
    Vous êtes mon idole et ma seule maîtresse ;
    Qu'on n'en aime pas moins pour devoir se cacher,
    ...

  • Adieu, Suzon, ma rose blonde,
    Qui m'as aimé pendant huit jours ;
    Les plus courts plaisirs de ce monde
    Souvent font les meilleurs amours.
    Sais-je, au moment où je te quitte,
    Où m'entraîne mon astre errant ?
    Je m'en vais pourtant, ma petite,
    Bien loin, bien vite,
    Toujours courant.

    Je pars, et sur ma lèvre ardente
    Brûle encor ton...

  • J'ai perdu ma force et ma vie,
    Et mes amis et ma gaieté;
    J'ai perdu jusqu'à la fierté
    Qui faisait croire à mon génie.

    Quand j'ai connu la Vérité,
    J'ai cru que c'était une amie ;
    Quand je l'ai comprise et sentie,
    J'en étais déjà dégoûté.

    Et pourtant elle est éternelle,
    Et ceux qui se sont passés d'elle
    Ici-bas ont tout ignoré.
    ...

  • Je vis d'abord sur moi des fantômes étranges
    Traîner de longs habits ;
    Je ne sais si c'étaient des femmes ou des anges !
    Leurs manteaux m'inondaient avec leurs belles franges
    De nacre et de rubis.

    Comme on brise une armure au tranchant d'une lame,
    Comme un hardi marin
    Brise le golfe bleu qui se fend sous sa rame,
    Ainsi leurs robes d'or, en...