• Les bois épais, les sirtes mornes, nues,
    Mêlent leurs bords dans les ombres chenues.
    En scintillant dans le zénith d'azur,
    On voit percer l'étoile solitaire :
    A l'occident, séparé de la terre,
    L'écueil blanchit sous un horizon pur,
    Tandis qu'au nord, sur les mers cristallines,
    Flotte la nue en vapeurs purpurines.
    D'un carmin vif les monts sont...

  • Romance.

    Combien j'ai douce souvenance
    Du joli lieu de ma naissance !
    Ma soeur, qu'ils étaient beaux les jours
    De France !
    O mon pays, sois mes amours
    Toujours !

    Te souvient-il que notre mère,
    Au foyer de notre chaumière,
    Nous pressait sur son coeur joyeux,
    Ma chère ?
    Et nous baisions ses blancs cheveux
    Tous...

  • Le passé n'est rien dans la vie,
    Et le présent est moins encor ;
    C'est à l'avenir qu'on se fie
    Pour donner joie et trésor.
    Tout mortel dans ses yeux devance
    Cet avenir où nous courrons ;
    Le bonheur est espérance ;
    On vit, en disant : nous verrons.

    Mais cet avenir plein de charmes,
    Qu'en est-il lorsqu'il est arrivé ?
    C'est le...

  • Des vastes mers tableau philosophique,
    Tu plais au coeur de chagrins agité :
    Quand de ton sein par les vents tourmenté,
    Quand des écueils et des grèves antiques
    Sortent des bruits, des voix mélancoliques,
    L'âme attendrie en ses rêves se perd,
    Et, s'égarant de penser en penser,
    Comme les flots de murmure en murmure,
    Elle se mêle à toute la nature...

  • Si la mort est le but, pourquoi donc sur les routes
    Est-il dans les buissons de si charmantes fleurs ?
    Et lorsqu'au vent d'automne elles s'envolent toutes,
    Pourquoi les voir partir d'un oeil momifié de pleurs ?

    Si la vie est le but, pourquoi donc sur les routes
    Tant de pierres dans l'herbe et d'épines aux fleurs,
    Que, pendant le voyage, hélas ! nous...

  • Sois-moi fidèle, ô pauvre habit que j'aime !
    Ensemble nous devenons vieux.
    Depuis dix ans, je te brosse moi-même,
    Et Socrate n'eut pas fait mieux.
    Quand le sort à ta mince étoffe
    Livrerait de nouveaux combats,
    Imite-moi, résiste en philosophe :
    Mon vieil ami, ne nous séparons pas.

    Je me souviens, car j'ai bonne mémoire,
    Du premier jour où je...

  • On parlera de sa gloire
    Sous le chaume bien longtemps.
    L'humble toit, dans cinquante ans,
    Ne connaîtra plus d'autre histoire.
    Là viendront les villageois
    Dire alors à quelque vieille
    Par des récits d'autrefois,
    Mère, abrégez notre veille.
    Bien, dit-on, qu'il nous ait nui,
    Le peuple encor le révère,
    Oui, le révère.
    Parlez-nous de...

  • Je viens revoir l'asile où ma jeunesse
    De la misère a subi les leçons.
    J'avais vingt-ans, une folle maîtresse,
    De francs amis et l'amour des chansons.
    Bravant le monde et les sots et les sages,
    Sans avenir, riche de mon printemps,
    Leste et joyeux je montais six étages.
    Dans un grenier qu'on est bien à vingt ans !

    C'est un grenier, point ne...

  • Mai 1813


    Il était un roi d'Yvetot
    Peu connu dans l'histoire ;
    Se levant tard, se couchant tôt,
    Dormant fort bien sans gloire,
    Et couronné par Jeanneton
    D'un simple bonnet de coton,
    Dit-on.
    Oh ! oh ! oh ! oh ! ah ! ah ! ah ! ah !
    Quel bon petit roi c'était là !
    La, la.

    Il faisait ses quatre repas
    Dans son...

  • Ah ! ne me dites pas que la vie est un rêve,
    Une ombre qui s'enfuit et flotte sous mes pas ;
    C'est le temps de la lutte, et si rien ne s'achève,
    L'éternel avenir a son germe ici-bas.

    La vie est un combat, la vie est une arène
    Où le devoir grandit du triomphe obtenu ;
    C'est le sentier qui monte, et pas à pas nous mène
    Aux sommets d'où la vue...