• Saison fidèle aux coeurs qu'importune la joie,
    Te voilà, chère Automne, encore de retour.
    La feuille quitte l'arbre, éclatante, et tournoie
    Dans les forêts à jour.

    Les aboiements des chiens de chasse au loin déchirent
    L'air inerte où l'on sent l'odeur des champs mouillés.
    Gonflés d'humidité, les prés mornes soupirent
    En cédant sous les pieds....

  • Ce soir, sur le chemin sonore du coteau,
    Nous menons en rêvant notre amour qui frissonne
    D'une obscure tiédeur sous le même manteau.
    Ô crépuscule amer de novembre ! L'automne
    Est soucieux comme un aïeul qu'on va quitter ;
    Son souffle large et fort sur la terre endormie
    Répand de solennels adieux. Las de monter,
    Bientôt nous suspendons nos pas, ô mon...

  • J'étais couché dans l'ombre au seuil de la forêt.
    Un talus du chemin désert me séparait.
    J'écoutais s'écouler près de moi, bruit débile,
    Une source qui sort d'une voûte d'argile.
    Par ce beau jour de juin brûlant et vaporeux
    L'horizon retenait des nuages heureux.
    Des faucheurs répandus à travers la prairie
    Abattaient ses remparts d'herbe haute et...

  • Tu sommeilles ; je vois tes yeux sourire encor.
    Ta gorge, ainsi deux beaux ramiers prennent l'essor,
    Se soulève et s'abaisse au gré de ton haleine.
    Tu t'abandonnes, lasse et nue et tout en fleur,
    Et ta chair amoureuse est rose de chaleur.
    Ta main droite sur toi se coule au creux de l'aine,
    Et l'autre sur mon coeur crispe ses doigts nerveux.
    Ce...

  • La nuit écoute et se penche sur l'onde
    Pour y cueillir rien qu'un souffle d'amour ;
    Pas de lueur, pas de musique au monde,
    Pas de sommeil pour moi ni de séjour.
    Ô mère, ô Nuit, de ta source profonde
    Verse-nous, verse enfin l'oubli du jour.

    Verse l'oubli de l'angoisse et du jour ;
    Chante ; ton chant assoupit l'âme et l'onde
    Fais de ton sein...

  • N'avez-vous pas vu, drapée en chlamyde,
    Une jeune femme aux cheveux ondés,
    Qui prend dans le ciel son regard humide,
    Car elle a les yeux d'azur inondés ?

    Son front souriant qu'un rêve traverse
    N'est pas couronné, mais elle a vingt ans.
    Et sur ce beau front la jeunesse verse,
    Verse à pleines mains les fleurs du printemps.

    Mais le ciel...

  • Je retrouve là-bas le taureau qui rumine
    Dans le pré de Potter, à l'ombre du moulin ;
    - La blonde paysanne allant cueillir le lin,
    Vers le gué de Berghem, les pieds nus, s'achemine.

    Dans le bois de Ruysdaël qu'un rayon illumine,
    La belle chute d'eau ! - Le soleil au déclin
    Sourit à la taverne où chaque verre est plein,
    - Taverne de Brauwer que l'...

  • Les souvenirs, ce sont les chambres sans serrures,
    Des chambres vides où l'on n'ose plus entrer,
    Parce que de vieux parents jadis y moururent.
    On vit dans la maison où sont ces chambres closes.
    On sait qu'elles sont là comme à leur habitude,
    Et c'est la chambre bleue, et c'est la chambre rose...
    La maison se remplit ainsi de solitude,
    Et l'on y continue...

  • Les trains rêvent dans la rosée, au fond des gares...
    Ils rêvent des heures, puis grincent et démarrent...
    J'aime ces trains mouillés qui passent dans les champs,
    Ces longs convois de marchandises bruissant,
    Qui pour la pluie ont mis leurs lourds manteaux de bâches,
    Ou qui forment la nuit entière dans les garages...
    Et les trains de bestiaux où beuglent...

  • Il y a de grands soirs où les villages meurent
    Après que les pigeons sont rentrés se coucher.
    Ils meurent, doucement, avec le bruit de l'heure
    Et le cri bleu des hirondelles au clocher...
    Alors, pour les veiller, des lumières s'allument,
    Vieilles petites lumières de bonnes soeurs,
    Et des lanternes passent, là-bas dans la brume...
    Au loin le chemin gris...