• Oh ! si l'homme naissait deux fois à la lumière,
    Que je tenterais peu les destins du nocher !
    Et de quel soin plus doux que ma chaîne première,
    J'attacherais mes jours au seuil de la chaumière
    Comme l'huître au rocher.

    Non, je ne suivrais plus une proue écumante
    Qui broie en poudre d'or les flots étincelants,
    Et je n'épierais plus, de la vague...

  • En vain dans mes rapports ta prudence m'arrête,
    Ma mère, il n'est plus temps ; tes pleurs m'ont fait poète !
    Si j'ai prié le ciel de me les révéler,
    Ces chants harmonieux, c'est pour te consoler.
    D'un tel désir pourquoi me verrai-je punie ?
    Les maux que tu prédis ne sont dus qu'au génie ;
    À d'illustres malheurs, va, je n'ai pas de droits :
    Quel cri peut...

  • I

    Oh ! lorsqu'un lourd soleil chauffait les grandes dalles
    Des ponts et de nos quais déserts,
    Que les cloches hurlaient, que la grêle des balles
    Sifflait et pleuvait par les airs ;
    Que dans Paris entier, comme la mer qui monte,
    Le peuple soulevé grondait,
    Et qu'au lugubre accent des vieux canons de fonte
    La Marseillaise répondait,
    Certe, on...

  • Il est, il est sur terre une infernale cuve,
    On la nomme Paris ; c'est une large étuve,
    Une fosse de pierre aux immenses contours
    Qu'une eau jaune et terreuse enferme à triples tours
    C'est un volcan fumeux et toujours en haleine
    Qui remue à longs flots de la matière humaine ;
    Un précipice ouvert à la corruption,
    Où la fange descend de toute nation,...

  • " C'est moi ; - moi qui, du fond des siècles et des âges,
    Fis blanchir le sourcil et la barbe des sages ;
    La terre à peine ouverte au soleil souriant,
    C'est moi qui, sous le froc des vieux rois d'Orient,
    Avec la tête basse et la face pensive,
    Du haut de la terrasse et de la tour massive,
    Jetai cette clameur au monde épouvanté
    Vanité. vanité, tout n'est que...

  • Ô Corse à cheveux plats ! que ta France était belle
    Au grand soleil de messidor !
    C'était une cavale indomptable et rebelle,
    Sans frein d'acier ni rênes d'or ;
    Une jument sauvage à la croupe rustique,
    Fumante encor du sang des rois,
    Mais fière, et d'un pied fort heurtant le sol antique,
    Libre pour la première fois.
    Jamais aucune main n'avait passé sur...

  • C'était orgueil de vivre en France-la-Louée,
    car Dieu l'avait élue et le monde avouée
    et, manifeste en tous ses gestes qu'il dictait,
    Dieu s'exprimait par elle - et la Terre écoutait.
    Les jeunes d'à présent, vous l'avez appauvrie
    de gloires et d'honneur jusqu'à la ladrerie,
    si - qu'à vous observer - nous, les vieux, nous songeons :
    la sève du vieux...

  • À Ad. Racot.

    Tous d'un vaste élan, et d'un pied hâtif, courent aux batailles,
    Les frémissements de la plaine immense emplissent les airs ;
    Ivre et foudroyant, le glaive vengeur, roi des funérailles,
    Dépèce à la Mort le corps des vaincus, leur sang et leurs chairs.
    Le canon grondant vomit des boulets ; des murs d'hommes croulent,
    Les chevaux pesants, dont les...

  • On dirait que ce vent vient de la mer lointaine ;
    Sous des nuages blonds l'azur du ciel verdit,
    Et, dans l'horizon blême, une brume incertaine
    S'amasse à flot épais, se dilate et grandit.

    Elle éteint le dernier éclat du soleil pâle
    Qui plonge et s'enfouit dans le vague Occident ;
    Son front, mélancolique et noirci par le hâle,
    Cache au fond du ciel...

  • Quelques feuilles, guirlande verte,
    Environnent de leur émail
    Cette jeune rose entrouverte,
    Petite coupe de corail.

    Ses pétales aux teintes blondes,
    Dont la nacre rose pâlit,
    Se frisent et semblent les ondes
    Du frais parfum qui la remplit.

    Vois-tu, soulevant de son aile
    Un nuage de tourbillons,
    Voler et tourner autour d'elle
    L'...