• A l'heure, où les bois d'aubépines,
    De combe en combe au loin neigeant,
    Apparaîtront dans les ravines
    Comme un léger brouillard d'argent,

    Nous irons dans la forêt brune,
    Dans l'ombre, écouter les récits,
    Que fait aux bois le clair de lune,
    Ce bleuâtre amant des taillis :

    Contes païens, récits épiques,
    Dont les combats, tragique enfer,...

  • Parmi les trèfles d'or et les roses d'émail,
    Peinte avec des yeux verts et des cheveux de cuivre
    Sur un ciel d'ocre pale, Yseulte clôt le livre,
    Dont six noms de princesse ornent l'épais fermail.

    Sa bouche, où le sang frais luit et perle en corail,
    Dit et son fauve amour et son ardeur de vivre.
    L'oeil sombre, où flotte un rêve impossible à poursuivre,
    A...

  • Comme un lointain étang baigné de clair de lune,
    Le passé m'apparaît dans l'ombre de l'oubli.
    Mon âme, entre les joncs, cadavre enseveli,
    S'y corrompt lentement dans l'eau jaunâtre et brune.

    Les croyances d'antan s'effeuillent une à une,
    Tandis qu'à l'horizon suavement pâli,
    Un vague appel de cor, un murmure affaibli
    Fait vibrer le silence endormi...

  • (pour Jeanne Charcot).


    ***

    Si les ondines et les fées
    Maintenant ainsi qu?autrefois
    Sur une coquille de noix
    Naviguaient, de corail coiffées,

    Et si j?étais, - car nous aimons
    Suivre parfois d?étranges rêves, -
    Un des minuscules démons
    Rois de la mer bleue et des grèves,

    Je ne voudrais d?autre travail
    Que d?...

  • L'école était charmante au temps des hannetons,
    Quand, par la vitre ouverte aux brises printanières,
    Pénétraient, nous parlant d'écoles buissonnières
    Et mettant la folie en nos jeunes cerveaux,
    Des cris d'oiseaux dans les senteurs des foins nouveaux ;
    Alors, pour laid qu'il fût, certes ! il savait nous plaire
    Notre cher mobilier si pauvrement scolaire....

  • À Maurice Nicolle.

    L'illustre ville meurt à l'ombre de ses murs ;
    L'herbe victorieuse a reconquis la plaine ;
    Les chapiteaux brisés saignent de raisins mûrs.

    Le barbare enroulé dans sa cape de laine
    Qui paît de l'aube au soir ses chevreaux outrageux,
    Foule sans frissonner l'orgueil du sol Hellène.

    Ni le soleil oblique au flanc des monts...

  • La nuit tiède est clémente à la ville qui dort ;
    Des lys impérieux triomphent dans la chambre
    Et cependant nos coeurs sont froids comme Décembre
    Et nos baisers d'amour amers comme la mort.

    Ta douce bouche s'ouvre à des chansons mièvres
    Et tes seins bienveillants accueillent mon front las ;
    Mais, ô ma douloureuse enfant, je ne sais pas
    Pourquoi les...

  • L'automne a dénudé les glèbes et le soir.
    Un soir d'exil et de mains désunies,
    S'approche à l'horizon des plaines infinies,
    Roi dévêtu de pourpre et spolié d'espoir.

    Ô marcheur aux pieds nus et las qui viens t'asseoir
    Sans compagnon, parmi les landes défleuries,
    Près des eaux mornes, quelles mêmes agonies
    Alourdissent ton front vers ce triste...

  • Je veux m'enfermer seul avec mon souvenir,
    Immobile, oublieux des rafales d'automne
    Qui font les frondaisons se rouiller et jaunir
    Et de la mer roulant sa plainte monotone ;
    Je veux m'enfermer seul avec mon souvenir.

    Le demi-jour filtrant des étoffes tendues
    Sera doux et propice à mon coeur nonchalant,
    Quand je l'évoquerai du fond des étendues,...

  • Que le vulgaire s'humilie
    Sur les parvis dorés du palais de Sylla,
    Au-devant du char de Tullie,
    Sous le sceptre de Claude et de Caligula !
    Ils régnèrent en dieux sur la foule tremblante :
    Leur domination sanglante
    Accabla le monde avili ;
    Mais les siècles vengeurs ont maudit leur mémoire,
    Et ce n'est qu'en léguant des forfaits à l'histoire
    Que leur...