• Je ne crains pas les coups du sort,
    Je ne crains rien, ni les supplices,
    Ni la dent du serpent qui mord,
    Ni le poison dans les calices,
    Ni les voleurs qui fuient le jour,
    Ni les sbires ni leurs complices,
    Si je suis avec mon Amour.

    Je me ris du bras le plus fort,
    Je me moque bien des malices,
    De la haine en fleur qui se tord,
    Plus...

  • Dans la forêt étrange, c'est la nuit ;
    C'est comme un noir silence qui bruit ;

    Dans la forêt, ici blanche et là brune,
    En pleurs de lait filtre le clair de lune.

    Un vent d'été, qui souffle on ne sait d'où,
    Erre en rêvant comme une âme de fou ;

    Et, sous des yeux d'étoile épanouie,
    La forêt chante avec un bruit de pluie.

    Parfois...

  • Amour qui voles dans les nues,
    Baisers blancs, fuyant sur l'azur,
    Et qui palpites dans les mues,
    Au nid sourd des forêts émues ;

    Qui cours aux fentes des vieux murs,
    Dans la mer qui de joie écume,
    Au flanc des navires, et sur
    Les grandes voiles de lin pur ;

    Amour sommeillant sur la plume
    Des aigles et des traversins,
    Que...

  • En été dans ta chambre claire,
    Vers le temps des premiers aveux,
    (Ce jeu-là paraissait Te plaire)
    On ouvrait parfois Baudelaire,
    Avec ton épingle à cheveux,

    Comme un croyant ouvre sa Bible,
    En s'imaginant que le Ciel,
    Dans un verset doux ou terrible,
    Va parler à son coeur sensible,
    Quelque peu superficiel ;

    D'avance on désignait...

  • Pendant qu'hésite encor ton pas sur la prairie,
    Le pays s'est de ciel houleux enveloppé.
    Tu cèdes, l'oeil levé vers la nuagerie,
    A ce doux midi blême et plein d'osier coupé.

    Nous avons tant suivi le mur de mousse grise
    Qu'à la fin, à nos flancs qu'une douleur emplit,
    Non moins bon que ton sein, tiède comme l'église,
    Ce fossé s'est ouvert aussi sûr...

  • Un vieux clocher coiffé de fer sur la colline.
    Des fenêtres sans cris, sous des toits sans oiseaux.
    D'un barbaresque Azur la paix du Ciel s'incline.
    Soleil dur ! Mort de l'ombre ! Et Silence des Eaux.

    Marius ! son fantôme à travers les roseaux,
    Par la plaine ! Un son lent de l'Horloge féline.
    Quatre enfants sur la place où l'ormeau perd ses os,
    ...

  • Quand je mourrai, ce soir peut-être,
    Je n'ai pas de jour préféré,
    Si je voulais, je suis le maître,
    Mais... ce serait mal me connaître,
    N'importe, enfin, quand je mourrai.

    Mes chers amis, qu'on me promette
    De laisser le bois... au lapin,
    Et, s'il vous plaît, qu'on ne me mette
    Pas, comme une simple allumette,
    Dans une boîte de sapin ;...

  • Des nuits du blond et de la brune
    Pas un souvenir n'est resté
    Pas une dentelle d'été,
    Pas une cravate commune ;

    Et sur le balcon où le thé
    Se prend aux heures de la lune
    Il n'est resté de trace, aucune,
    Pas un souvenir n'est resté.

    Seule au coin d'un rideau piquée,
    Brille une épingle à tête d'or
    Comme un gros insecte qui...

  • Elle vint dans Ninive énorme, où sont les fous
    Qui veillent dans les lits et dorment sur les tables,
    Et le théâtre est cendre où, les soirs ineffables,
    Elle noyait sa tête aux crins des lions doux.

    Fixant sur eux des yeux charmeurs comme en des fables,
    Elle allait, éteignant leurs cris dans ses genoux,
    Calme, et trouvant l'odeur des palmes et des sables...

  • Le Ciel a de jeunes pâturages
    Tendres, vers un palais triste et vermeil :
    Un Essaim d'Heures sauvages
    Guide Pasiphaé, petite-fille du Soleil.

    Des troupeaux silencieux du ciel,
    Un nuage, un doux taureau s'écume,
    Se détache, avec le souci réel
    Du Baiser qui l'arrose et la parfume.

    Et ces neiges, fraîcheur et ferveur,
    Au ciel des...