•  
    La vipère se tint debout sur ma savate,
    Me fascina, fondit sur moi du premier coup,
    Et se laissant glisser de ma tête à mon cou,
    Me fit une onduleuse et sifflante cravate.

    Puis elle déroula ses longs anneaux ; et fou,
    Tout mon corps, possédé du monstre à tête plate,
    Ressentit au milieu d’une brume écarlate
    La froide ubiquité d’un enlacement...

  • De la sorte — parlant par la voix du Curé —
    La cendre de l’âtre interpelle
    La chambrière antique à l’air dur et madré
    Qui vient la prendre avec sa pelle :

    ...

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    Celui qui garde dans la foule
    Un éternel isolement
    Et qui sourit quand il refoule
    Un horrible gémissement ;

    Celui qui s’en va sous la nue,
    Triste et pâle comme un linceul,
    Gesticulant, la tête nue,
    L’œil farouche et causant tout seul ;

    Celui qu’une odeur persécute,
    Et qui tressaille au moindre bruit
    En maudissant chaque...

  •  
    La chair de femme sèche ou grasse
    Est le fruit de la volupté
    Tour à tour vert, mûr et gâté
    Que le désir cueille ou ramasse.

    Mystérieuse dans sa grâce,
    Exquise dans son âcreté,
    La chair de femme sèche ou grasse
    Est le fruit de la volupté.

    Pas un seul homme ne s’en lasse.
    Chacun avec avidité
    Y mordrait pour l’éternité.
    ...

  •  
    Ma chambre est pareille à mon âme,
    Comme la mort l’est au sommeil :
    Au fond de l’âtre, pas de flamme
    À la vitre, pas de soleil !

    Les murailles sont recouvertes
    D’un lamentable papier gris
    Où l’ombre des persiennes vertes
    Met des taches de vert-de-gris.

    Au-dessus de mon chevet sombre
    Pend un Christ à l’air ingénu,
    Qui semble...

  • Le champ fourmille de chardons :
    Quel paradis pour le vieil âne !
    Adieu bât, sangles et bridons !
    Le champ fourmille de chardons.
    La brise mêle ses fredons
    À ceux de la petite Jeanne !
    Le champ fourmille de chardons :
    Quel paradis pour le vieil âne !

    En chantant au bord du fossé
    La petite Jeanne tricote.
    Elle songe à son fiancé...

  • — Le merle fuit, plein de paniques,
    Les buissons recroquevillés :
    Entendez-vous sous les noyers
    Ces chuchotements ironiques ?

    Quelles visions tyranniques !
    J’en ai les yeux écarquillés.
    — Le merle fuit, plein de paniques.
    Les buissons recroquevillés.

    Quant aux petits fumiers coniques,
    Ils sont horriblement grillés.
    S’ils allaient...

  • La chanson de la perdrix grise
    Ou la complainte des grillons,
    C’est la musique des sillons
    Que j’ai toujours si bien comprise.

    Sous l’azur, dans l’air qui me grise,
    Se mêle au vol des papillons
    La chanson de la perdrix grise
    Ou la complainte des grillons.

    Et l’ennui qui me martyrise
    Me darde en vain ses aiguillons,
    Puisqu’à l’abri...

  •  
    Je t’ensevelis pour jamais,
    Idole si mièvre et si fausse :
    Dans l’oubli j’ai creusé la fosse
    Oblongue et froide où je te mets.

    Ne crois pas que sur mes sommets
    Jusqu’à moi ton spectre se hausse !
    Je t’ensevelis pour jamais,
    Idole si mièvre et si fausse.

    Je suis tout seul au monde, mais
    Contre moi-même je m’adosse,
    Et l’...

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    Nos soupirs s’en vont dans la tombe
    Comme des souffles dans la nuit,
    Et nos plaintes sont un vain bruit
    Comme celles de la colombe.

    Tout prend son vol et tout retombe,
    Tout s’enracine et tout s’enfuit !
    Nos soupirs s’en vont dans la tombe
    Comme des souffles dans la nuit.

    C’est toujours la mort qui surplombe
    Le nouvel amour qui...