• Si j'étais la feuille que roule
    L'aile tournoyante du vent,
    Qui flotte sur l'eau qui s'écoule,
    Et qu'on suit de l'oeil en rêvant ;

    Je me livrerais, fraîche encore,
    De la branche me détachant,
    Au zéphyr qui souffle à l'aurore,
    Au ruisseau qui vient du couchant.

    Plus loin que le fleuve, qui gronde,
    Plus loin que les vastes forêts,
    ...

  • De quoi parlait le vent ? De quoi tremblaient les branches ?
    Était-ce, en ce doux mois des nids et des pervenches,
    Parce que les oiseaux couraient dans les glaïeuls,
    Ou parce qu'elle et moi nous étions là tout seuls ?
    Elle hésitait. Pourquoi ? Soleil, azur, rosées,
    Aurore ! Nous tâchions d'aller, pleins de pensées,
    Elle vers la campagne et moi vers la forêt...

  • Puisqu'ici-bas toute âme
    Donne à quelqu'un
    Sa musique, sa flamme,
    Ou son parfum ;

    Puisqu'ici toute chose
    Donne toujours
    Son épine ou sa rose
    A ses amours ;

    Puisqu'avril donne aux chênes
    Un bruit charmant ;
    Que la nuit donne aux peines
    L'oubli dormant ;

    Puisque l'air à la branche
    Donne l'oiseau ;
    Que l'...

  • L'univers, c'est un livre, et des yeux qui le lisent.

    Ceux qui sont dans la nuit ont raison quand ils disent :
    Rien n'existe ! Car c'est dans un rêve qu'ils sont.

    Rien n'existe que lui, le flamboiement profond,
    Et les âmes, les grains de lumière, les mythes,
    Les moi mystérieux, atomes sans limites,
    Qui vont vers le grand moi, leur centre et leur...

  • Ces âmes que tu rappelles,
    Mon coeur, ne reviennent pas.
    Pourquoi donc s'obstinent-elles,
    Hélas ! à rester là-bas ?

    Dans les sphères éclatantes,
    Dans l'azur et les rayons,
    Sont-elles donc plus contentes
    Qu'avec nous qui les aimions ?

    Nous avions sous les tonnelles
    Une maison près Saint-Leu.
    Comme les fleurs étaient belles !
    ...

  • Un ravin de ces monts coupe la noire crête ;
    Comme si, voyageant du Caucase au Cédar,
    Quelqu'un de ces Titans que nul rempart n'arrête
    Avait fait passer sur la tête
    La roue immense de son char.

    Hélas ! combien de fois, dans nos temps de discorde,
    Des flots de sang chrétien et de sang mécréant,
    Baignant le cimeterre et la miséricorde,
    Ont changé...

  • Quand le livre où s'endort chaque soir ma pensée,
    Quand l'air de la maison, les soucis du foyer,
    Quand le bourdonnement de la ville insensée
    Où toujours on entend quelque chose crier,

    Quand tous ces mille soins de misère ou de fête
    Qui remplissent nos jours, cercle aride et borné,
    Ont tenu trop longtemps, comme un joug sur ma tête,
    Le regard de mon âme...

  • Jeune fille, l'amour, c'est d'abord un miroir
    Où la femme coquette et belle aime à se voir,
    Et, gaie ou rêveuse, se penche ;
    Puis, comme la vertu, quand il a votre coeur,
    Il en chasse le mal et le vice moqueur,
    Et vous fait l'âme pure et blanche ;

    Puis on descend un peu, le pied vous glisse... - Alors
    C'est un abîme ! en vain la main s'attache aux...

  • Cent mille hommes, criblés d'obus et de mitraille,
    Cent mille hommes, couchés sur un champ de bataille,
    Tombés pour leur pays par leur mort agrandi,
    Comme on tombe à Fleurus, comme on tombe à Lodi,
    Cent mille ardents soldats, héros et non victimes,
    Morts dans un tourbillon d'évènements sublimes,
    D'où prend son vol la fière et blanche Liberté,
    Sont un malheur...

  • La lune était sereine et jouait sur les flots. -
    La fenêtre enfin libre est ouverte à la brise,
    La sultane regarde, et la mer qui se brise,
    Là-bas, d'un flot d'argent brode les noirs îlots.

    De ses doigts en vibrant s'échappe la guitare.
    Elle écoute... Un bruit sourd frappe les sourds échos.
    Est-ce un lourd vaisseau turc qui vient des eaux de Cos,
    ...