• La nuit était fort noire et la forêt très-sombre.
    Hermann à mes côtés me paraissait une ombre.
    Nos chevaux galopaient. A la garde de Dieu !
    Les nuages du ciel ressemblaient à des marbres.
    Les étoiles volaient dans les branches des arbres
    Comme un essaim d'oiseaux de feu.

    Je suis plein de regrets. Brisé par la souffrance,
    L'esprit profond d'...

  • I

    Aux champs, compagnons et compagnes !
    Fils, j'élève à la dignité
    De géorgiques les campagnes
    Quelconques où flambe l'été !

    Flamber, c'est là toute l'histoire
    Du coeur, des sens, de la saison,
    Et de la pauvre mouche noire
    Que nous appelons la raison.

    Je te fais molosse, ô mon dogue !
    L'acanthe manque ? j'ai le thym....

  • Un groupe tout à l'heure était là sur la grève,
    Regardant quelque chose à terre. - Un chien qui crève !
    M'ont crié des enfants ; voilà tout ce que c'est. -
    Et j'ai vu sous leurs pieds un vieux chien qui gisait.
    L'océan lui jetait l'écume de ses lames.
    - Voilà trois jours qu'il est ainsi, disaient des femmes,
    On a beau lui parler, il n'ouvre pas les yeux.
    -...

  • Pendant que le marin, qui calcule et qui doute
    Demande son chemin aux constellations ;
    Pendant que le berger, l'oeil plein de visions,
    Cherche au milieu des bois son étoile et sa route ;
    Pendant que l'astronome, inondé de rayons,

    Pèse un globe à travers des millions de lieues,
    Moi, je cherche autre chose en ce ciel vaste et pur.
    Mais que ce...

  • Booz s'était couché de fatigue accablé ;
    Il avait tout le jour travaillé dans son aire ;
    Puis avait fait son lit à sa place ordinaire ;
    Booz dormait auprès des boisseaux pleins de blé.

    Ce vieillard possédait des champs de blés et d'orge ;
    Il était, quoique riche, à la justice enclin ;
    Il n'avait pas de fange en l'eau de son moulin ;
    Il n'avait pas d'...

  • (IV)

    Ève offrait au ciel bleu la sainte nudité ;
    Ève blonde admirait l'aube, sa soeur vermeille.

    Chair de la femme ! argile idéale ! ô merveille !
    Pénétration sublime de l'esprit
    Dans le limon que l'Être ineffable pétrit !
    Matière où l'âme brille à travers son suaire !
    Boue où l'on voit les doigts du divin statuaire !
    Fange auguste appelant...

  • Enfants ! - Oh ! revenez ! Tout à l'heure, imprudent,
    Je vous ai de ma chambre exilés en grondant,
    Rauque et tout hérissé de paroles moroses.
    Et qu'aviez-vous donc fait, bandits aux lèvres roses ?
    Quel crime ? quel exploit ? quel forfait insensé ?
    Quel vase du Japon en mille éclats brisé ?
    Quel vieux portrait crevé ? Quel beau missel gothique
    Enrichi par...

  • Maintenant que Paris, ses pavés et ses marbres,
    Et sa brume et ses toits sont bien loin de mes yeux ;
    Maintenant que je suis sous les branches des arbres,
    Et que je puis songer à la beauté des cieux ;

    Maintenant que du deuil qui m'a fait l'âme obscure
    Je sors, pâle et vainqueur,
    Et que je sens la paix de la grande nature
    Qui m'entre dans le c?ur ;...

  • Le soleil s'est couché ce soir dans les nuées.
    Demain viendra l'orage, et le soir, et la nuit ;
    Puis l'aube, et ses clartés de vapeurs obstruées ;
    Puis les nuits, puis les jours, pas du temps qui s'enfuit !

    Tous ces jours passeront; ils passeront en foule
    Sur la face des mers, sur la face des monts,
    Sur les fleuves d'argent, sur les forêts où roule
    ...

  • Merci, poète! -- au seuil de mes lares pieux,
    Comme un hôte divin, tu viens et te dévoiles ;
    Et l'auréole d'or de tes vers radieux
    Brille autour de mon nom comme un cercle d'étoiles.

    Chante ! Milton chantait ; chante ! Homère a chanté.
    Le poète des sens perce la triste brume ;
    L'aveugle voit dans l'ombre un monde de clarté.
    Quand l'oeil du corps...