• Messagers du sommeil, allez à la mal'heure,
    Annoncez le desastre aux coupables humains,
    Et sans nous estonner de vos fantosmes vains,
    Rendez nostre aventure ou douteuse, ou meilleure.

    Apollon ne void point vostre sombre demeure,
    Pour vous communiquer ses Oracles certains.
    Quelle part avons nous à vos antres lointains ?
    Affligez vous Iris, afin qu'...

  • Une fleur passagère, une vaine peinture,
    Faisaient de mes beaux jours les plus douces clartés,
    Et dans un labyrinthe, errant de tous côtés,
    Je faisais de mon sort la douteuse aventure.

    Sans aucun soin du temps, ni de la sépulture,
    La fureur m'emportait parmi les vanités,
    Et toujours soupirant après mille beautés,
    J'écoutais de l'Amour l'agréable...

  • Quand je la vois briller sous un voile funeste,
    Comme une autre Diane, au milieu de la nuit,
    Quelle est mon aventure ? à quoi suis-je réduit ?
    Je demeure confus, sans parole, et sans geste.

    Vous à qui sa rigueur jamais rien ne conteste,
    Vous en qui ma pensée et ma flamme reluit,
    Allez, regards, soupirs, où l'Amour vous conduit :
    Votre douce...

  • La voix qui retentit de l'un à l'autre Pole,
    La terreur et l'espoir des vivans et des morts,
    Qui du rien sçait tirer les esprits et les corps,
    Et qui fit l'Univers, d'une seule parole.

    La voix du Souverain, qui les cedres desole,
    Cependant que l'espine estale ses tresors ;
    Qui contre la cabane espargne ses efforts,
    Et reduit à neant l'orgueil du...

  • L'hiver au doux printemps vient de céder la place,
    Mars de sa tiède haleine a réchauffé l'espace,
    La prairie étale ses fleurs :
    Revenez donc, mes hirondelles,
    Ne me soyez point infidèles,
    Revenez, le bruit de vos ailes
    A l'instant suspendra mes pleurs.

    Laissant au rossignol les arbres du bocage,
    Dans mes vases garnis de fleurs et de feuillage...

  • Quand vous verrez un homme avecque gravité
    En chapeau de clabaud promener sa savate
    Et le col étranglé d'une sale cravate,
    Marcher arrogamment dessus la chrétienté,

    Barbu comme un sauvage et jusqu'aux reins crotté,
    D'un haut de chausse noir sans ceinture et sans patte,
    Et de quelques lambeaux d'une vieille buratte
    En tous temps constamment couvrir...

  • Je t'aime d'être faible et câline en mes bras
    Et de chercher le sûr refuge de mes bras
    Ainsi qu'un berceau tiède où tu reposeras.

    Je t'aime d'être rousse et pareille à l'automne,
    Frêle image de la Déesse de l'automne
    Que le soleil couchant illumine et couronne.

    Je t'aime d'être lente et de marcher sans bruit
    Et de parler très bas et de haïr le...

  • Tu ne seras jamais la fiévreuse captive
    Qu'enchaîne, qu'emprisonne le lit,
    Tu ne seras jamais la compagne lascive
    Dont la chair se consume et dont le front pâlit.
    Garde ton blanc parfum qui dédaigne le faste.

    Tu ne connaîtras point les lâches abandons,
    Les sanglots partagés qui font l'âme plus vaste,
    Le doute et la faiblesse ardente des pardons
    Et...

  • Voici la nuit : je vais ensevelir mes morts,
    Mes songes, mes désirs, mes douleurs, mes remords,
    Tout le passé... je vais ensevelir mes morts.

    J'ensevelis, parmi les sombres violettes,
    Tes yeux, tes mains, ton front et tes lèvres muettes,
    Ô toi qui dors parmi les sombres violettes !

    J'emporte cet éclair dernier de ton regard...
    Dans le choc de la...

  • Ta royale jeunesse a la mélancolie
    Du Nord où le brouillard efface les couleurs,
    Tu mêles la discorde et le désir aux pleurs,
    Grave comme Hamlet, pâle comme Ophélie.

    Tu passes, dans l'éclair d'une belle folie,
    Comme elle, prodiguant les chansons et les fleurs,
    Comme lui, sous l'orgueil dérobant tes douleurs,
    Sans que la fixité de ton regard oublie...