C?est un soir tendre comme un visage de femme.
Un soir étrange, éclos sur l?hiver âpre et dur,
Dont la suavité, flottante au clair-obscur,
Tombe en charpie exquise aux blessures de l?âme.
Des verts angelisés... des roses d?anémie...
L?Arc-de-Triomphe au loin s?estompe velouté,
Et la nuit qui descend à l?Occident bleuté
Verse aux nerfs douloureux la très...
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Blotti comme un oiseau frileux au fond du nid,
Les yeux sur ton profil, je songe à l?infini...
Immobile sur les coussins brodés, j?évoque
L?enchantement ancien, la radieuse époque,
Et les rêves au ciel de tes yeux verts baignés !
Et je revis, parmi les objets imprégnés
De ton parfum intime et cher, l?ancienne année
Celle qui flotte encor dans ta... -
Au temps des Immortels, fils de la vie en fête,
Où la Lyre élevait les assises des tours,
Un artisan sacré modela mes contours
Sur le sein d'une vierge, entre ses soeurs parfaite,
Des siècles je régnai, splendide et satisfaite,
Et les yeux m'adoraient... Quand, vers la fin des jours,
De mes félicités le sort rompit le cours,
Et je fus emportée au vent... -
Mon enfance captive a vécu dans des pierres,
Dans la ville où sans fin, vomissant le charbon,
L?usine en feu dévore un peuple moribond.
Et pour voir des jardins je fermais les paupières...
J?ai grandi ; j?ai rêvé d?orient, de lumières,
De rivages de fleurs où l?air tiède sent bon,
De cités aux noms d?or, et, seigneur vagabond,
De pavés florentins où... -
Le soleil brûlant
Les fleurs qu'en allant
Tu cueilles,
Viens fuir son ardeur
Sous la profondeur
Des feuilles.
Cherchons les sentiers
A demi frayés
Où flotte,
Comme dans la mer,
Un demi-jour vert
De grotte.
Des halliers touffus
Un soupir confus
S'éléve
Si doux qu'on dirait
Que c'est la forêt
... -
Mon coeur est comme un Hérode morne et pâle,
Un Salomon somptueux, triste et puissant
Qui suit d?un oeil magnifique et languissant
Les ballets infinis dans les hautes salles.
Rêve sans fin, les plus belles ont passé,
Portant des noms si doux qu?ils font chanter l?âme.
Le roi s?ennuie à voir tourner ses femmes,
Roses de feu, les plus chaudes l?ont glacé... -
Parfois la mort passant devant l?auberge infâme
Cogne ; et la peur gargouille au ventre des laquais...
Les grands vaisseaux d?orgueil pourrissent près des quais.
Et nous n?attendons plus le Dieu né d?une femme.
Orphelins du passé, nous avons tous dans l?âme,
Désertes au soleil, de mornes Palanqués.
Sur l?eau morte des coeurs fiévreux et compliqués
D?... -
Sur la petite place, au lever de l'aurore,
Le marché rit joyeux, bruyant, multicolore,
Pêle-mêle étalant sur ses tréteaux boiteux
Ses fromages, ses fruits, son miel, ses paniers d'oeufs,
Et, sur la dalle où coule une eau toujours nouvelle,
Ses poissons d'argent clair, qu'une âpre odeur révèle.
Mylène, sa petite Alidé par la main,
Dans la foule se fraie avec... -
Nos sens, nos sens divins sont de beaux enfants nus
Jouant aux vagues d?or des vieilles mers païennes,
Innocents, radieux, ivres, les deux mains pleines
Des fruits juteux cueillis aux jardins ingénus.
Pensive et poursuivant ses antiques chimères
L?âme assise non loin surveille leurs ébats ;
Parfois son doigt se lève et commande et, tout bas,
Elle agite... -
Remonte, lent rameur, le cours de tes années,
Et, les yeux clos, suspends ta rame par endroits...
La brise qui s?élève aux jardins d?autrefois
Courbe suavement les âmes inclinées.
Cherche en ton coeur, loin des grand?routes calcinées,
L?enclos plein d?herbe épaisse et verte où sont les croix.
Écoutes-y l?air triste où reviennent les voix,
Et baise au...