• Quiconque fit d'Amour la pourtraiture,
    De cet Enfant le patron ou prit il,
    Sur qui tant bien il guida son outil
    Pour en tirer au vray ceste peinture ?

    Certe il sçavoyt l'effet de sa pointure,
    Le garnissant d'un arc non inutil :
    Bandant ses yeulx de son pinceau subtil,
    Il demonstroit nostre aveugle nature.

    Tel qu'en ton coeur, ô peintre,...

  • L'Amour qui me tourmente
    Je trouve si plaisant
    Que tant plus il s'augmente
    Moins j'en veux estre exemt :
    Bien que jamais le somme
    Ne me ferme les yeux,
    Plus amour me consomme
    Moins il m'est ennuyeux.

    Toute la nuit je veille
    Sans cligner au sommeil,
    Remembrant la merveille
    Qui me tient en éveil,
    Me representant celle...

  • Depuis qu'Amour ma poitrine recuit,
    Bouillante au feu de sa plus chaude braise
    De mille ennuis en immortel malaise,
    Dont maint souci dans moy l'un l'autre suit :

    J'oubli tout bien pour un bien qui me fuit,
    Par un plaisir dont la douceur m'embraise,
    Si bien qu'il faut que nul autre me plaise,
    Et qu'en luy seul je preigne mon deduit.

    Mais...

  • D'Amour d'Amour je fu je fu blessé,
    Et de mon sang la liqueur goute a goute
    En chaudes pleurs hors ma playe degoute,
    Qui de couler puis le temps n'a cessé.

    Je suis d'Amour si bien interessé.
    Que peu a peu s'enfuit ma force toute,
    Et quelque onguent qu'a ma playe je boute
    Sans l'etancher, mon mal ne m'a laissé.

    En tel estat ma blessure...

  • Aussi souvent qu'Amour fait penser à mon âme,
    Combien il mit d'attraits dans les yeux de ma Dame,
    Combien c'est de l'honneur d'aimer en si bon lieu,
    Je m'estime aussi grand et plus heureux qu'un Dieu.
    Amaranthe, Phillis, Caliste, Pasithée,
    Je hais cette mollesse à vos noms affectée ;
    Ces titres qu'on vous fait avecque tant d'appas,
    Témoignent qu'en...

  • Un de ses bras fléchit sous son cou qui le presse,
    L'autre sur son beau front retombe avec mollesse,
    Et le couvre à demi :
    Telle, pour sommeiller, la blanche tourterelle
    Courbe son cou d'albâtre et ramène son aile
    Sur son oeil endormi !

    Le doux gémissement de son sein qui respire
    Se mêle au bruit plaintif de l'onde qui soupire
    À flots harmonieux...

  • Naples, 1822.

    Si tu pouvais jamais égaler, ô ma lyre,
    Le doux frémissement des ailes du zéphyre
    À travers les rameaux,
    Ou l'onde qui murmure en caressant ces rives,
    Ou le roucoulement des colombes plaintives,
    Jouant aux bords des eaux ;

    Si, comme ce roseau qu'un souffle heureux anime,
    Tes cordes exhalaient ce langage sublime,
    Divin...

  • Viens, cherchons cette ombre propice
    Jusqu'à l'heure où de ce séjour
    Les fleurs fermeront leur calice
    Aux regards languissants du jour.
    Voilà ton ciel, ô mon étoile !
    Soulève, oh ! soulève ce voile,
    Éclaire la nuit de ces lieux ;
    Parle, chante, rêve, soupire,
    Pourvu que mon regard attire
    Un regard errant de tes yeux.

    Laisse-moi...

  • Pourquoi de tes regards percer ainsi mon âme ?
    Baisse, oh ! baisse tes yeux pleins d'une chaste flamme :
    Baisse-les, ou je meurs.
    Viens plutôt, lève-toi ! Mets ta main dans la mienne,
    Que mon bras arrondi t'entoure et te soutienne
    Sur ces tapis de fleurs.

    ............................................

    Aux bords d'un lac d'azur il est une colline...

  • Un jour, le temps jaloux, d'une haleine glacée,
    Fanera tes couleurs comme une fleur passée
    Sur ces lits de gazon ;
    Et sa main flétrira sur tes charmantes lèvres
    Ces rapides baisers, hélas ! dont tu me sèvres
    Dans leur fraîche saison.

    Mais quand tes yeux, voilés d'un nuage de larmes,
    De ces jours écoulés qui t'ont ravi tes charmes
    Pleureront...