Madame, ce matin je vous offre une fleur
Qui du sang de Narcis a pris son origine :
Pour vous y comparer Amour vous la destine,
Et vous vient consacrer son tige et sa couleur.
Vous semblez un Narcis de grâce et de rigueur,
Il avait comme vous l'apparence divine,
De sa vive beauté l'onde fut la ruine,
Et je crains qu'un miroir cause votre malheur !...
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Parmi ces monts où séjourne l'ombrage,
L'asil' n'est point d'antre ni de rocher,
Où jour et nuit ne me vaise chercher
La mort pour fin de l'amour qui m'outrage.
Il n'est aussi ni ruisseau ni bocage.
Arbres ni fleurs que je puisse approcher,
Qui de mon mal ne se laisse toucher,
Oyant ma plainte et mon triste langage.
Ces champs divers vont... -
Puisque l'absence me retire
En ce désert où je soupire
L'amour qui me rend furieux,
Puisque le sort me porte envie,
Je veux faire écouler ma vie
Par les fontaines de mes yeux.
Puisqu'un autre à mon bien succède,
Puisque mon mal est sans remède,
L'espoir doit être supprimé.
Puisqu'en vain le ciel je réclame,
Et puisque j'ai perdu... -
Un amant qui poursuit les beaux yeux d'une dame,
Et qui les a choisis pour miroir de son âme,
Qui trompe son esprit aux rais de tel flambeau,
S'encourt hâtivement à son heure dernière,
Comme celui qui suit d'un ardant la lumière
Qui le conduit au fleuve où il fait son tombeau.
Il peint dedans la nue, il bâtit sur l'arène,
Il fonde sur les flots... -
Amour trouva Diane en la claire fontaine,
Lorsqu'elle se baignait dans les flots argentés,
Sans crainte d'être vue en ces bois écartés
Où jadis le chasseur perdit la forme humaine.
Lors il prit en sa trousse une flèche inhumaine,
Pensant bien entamer ses diverses beautés,
Comme il fit à Phébus par ses traits indomptés,
Quand il suivait Daphné qui... -
Ô misérable vie ! ici bas agitée
Comme sont les vaisseaux errant dessus les flots,
Sujette au trait fatal de la fière Atropos,
Des lâches ignorants si chère et souhaitée.
Un chacun se propose en son âme flattée
De posséder son bien, d'en jouir en repos,
Mais leur espoir s'enfuit au vent de ces propos :
Car le temps nous abuse en forme d'un Protée.... -
Las ! on dit que La Roque a l'humeur solitaire,
Et qu'on le voit toujours dans un bois écarté.
Mais si quelqu'un savait comme il est tourmenté,
Il plaindrait le destin qui lui est si contraire.
S'il cherche pour demeure un sauvage repaire,
Le silence, l'horreur, l'ombre, l'obscurité,
C'est que le beau soleil qui cause sa clarté
Luit ailleurs, le... -
Deux femmes aujourd'hui me donnent espérance
De vaincre la rigueur de mon amoureux sort,
L'une est ma belle dame où Amour tient son fort,
La seconde Atropos qui notre fin avance.
Deux puissants Dieux aussi me donnent assurance
De porter à mon mal quelque peu de confort,
Amour est le premier, le second est la Mort,
D'où j'attends ou plaisir ou fin... -
Sentir d'un feu brûlant l'extrême violence
Sans qu'une mer de pleurs le puisse modérer,
Plus on souffre de mal pouvoir moins soupirer,
Et celer dans le coeur ce qui plus vous offense.
Mourir près d'un sujet, languir en son absence,
Tantôt rougir, pâlir, craindre et désespérer,
Et voir un autre amant votre bien désirer,
Et tirer devant vous faveur... -
Sous les ombres du bois, au bord d'une fontaine,
Passant et ma tristesse et la chaleur des jours,
Je trouvai la beauté cause de mes amours
Qui me fit dans le coeur une plaie inhumaine.
Par ce prompt accident, je vois ma mort prochaine,
Je vois ma mort prochaine, éloigné de secours,
D'autant que les rochers et les arbres sont sourds,
Et que rien ne...