• Sonnet

    Quoi ! Sans te soucier de l'océan qui gronde,
    Tu veux ta place à bord, sur mon vaisseau perdu ;
    Et pour dire à Colomb qu'il a trouvé son monde,
    Tu n'attends pas, enfant, qu'il en soit revenu !

    Dans tes bras frémissants j'ai mis ma tête blonde.
    J'ai bu ton souffle en feu, dans mon sein répandu ;
    Et, comme le pêcheur voit la perle sous l'onde...

  • Savez-vous pas quelque douce retraite,
    Au fond des bois, un lac au flot vermeil,
    Où des palmiers la grande feuille arrête
    Les bruits du monde et les traits du soleil
    - Oh ! je voudrais, loin de nos vieilles villes,
    Par la savane aux ondoyants cheveux,
    Suivre, en rêvant, les écureuils agiles,
    Et voir sauter, sur les branches mobiles,
    L'ara de pourpre et...

  • Le long du fleuve jaune, on ferait bien des lieues,
    Avant de rencontrer un mandarin pareil.
    Il fume l'opium, au coucher du soleil,
    Sur sa porte en treillis, dans sa pipe à fleurs bleues.

    D'un tissu bigarré son corps est revêtu ;
    Son soulier brodé d'or semble un croissant de lune ;
    Dans sa barbe effilée il passe sa main brune,
    Et sourit doucement sous...

  • (Song-Tchi-Ouen)

    Le vent avait chassé la pluie aux larges gouttes,
    Le soleil s'étalait, radieux, dans les airs,
    Et les bois, secouant la fraîcheur de leurs voûtes,
    Semblaient, par les vallons, plus touffus et plus verts !

    Je montai jusqu'au temple accroché sur l'abîme ;
    Un bonze m'accueillit, un bonze aux yeux baissés.
    Là, dans les profondeurs de...

  • Ce n'est pas le vent seul, quand montent les marées,
    Qui se lamente ainsi dans les goémons verts,
    C'est l'éternel sanglot des races éplorées !
    C'est la plainte de l'homme englouti sous les mers.

    Ces débris ont vécu dans la lumière blonde ;
    Avant toi, sur la terre ils ont marqué leurs pas.
    Contemple avec effroi ce qui reste d'un monde,
    Et d'un pied...

  • Quand, sur le grand taureau, tu fendais les flots bleus,
    Vierge phénicienne, Europe toujours belle,
    La mer, soumise au Dieu, baisait ton pied rebelle,
    Le vent n'osait qu'à peine effleurer tes cheveux !

    Un amant plus farouche, un monstre au cou nerveux
    T'emporte, maintenant, dans sa course éternelle ;
    La rafale, en fureur, te meurtrit de son aile ;
    La...