• Ah ! je les reconnais, et mon coeur se réveille.
    Ô sons ! ô douces voix chères à mon oreille !
    Ô mes Muses, c'est vous ; vous mon premier amour,
    Vous qui m'avez aimé dès que j'ai vu le jour.
    Leurs bras, à mon berceau dérobant mon enfance,
    Me portaient sous la grotte où Virgile eut naissance,
    Où j'entendais le bois murmurer et frémir,
    Où leurs yeux dans...

  • (Saint-Lazare)

    Triste vieillard, depuis que pour tes cheveux blancs
    Il n'est plus de soutien de tes jours chancelants,
    Que ton fils orphelin n'est plus à son vieux père,
    Renfermé sous ton toit et fuyant la lumière,
    Un sombre ennui t'opprime et dévore ton sein.
    Sur ton siège de hêtre, ouvrage de ma main,
    Sourd à tes serviteurs, à tes amis eux-même...

  • Aujourd'hui qu'au tombeau je suis prêt à descendre,
    Mes amis, dans vos mains je dépose ma cendre.
    Je ne veux point, couvert d'un funèbre linceul,
    Que les pontifes saints autour de mon cercueil,
    Appelés aux accents de l'airain lent et sombre,
    De leur chant lamentable accompagnent mon ombre,
    Et sous des murs sacrés aillent ensevelir
    Ma vie, et ma dépouille, et...

  • Jeune fille, ton coeur avec nous veut se taire
    Tu fuis, tu ne ris plus ; rien ne saurait te plaire.
    La soie à tes travaux offre en vain des couleurs ;
    L'aiguille sous tes doigts n'anime plus des fleurs.
    Tu n'aimes qu'à rêver, muette, seule, errante,
    Et la rose pâlit sur ta bouche mourante.
    Ah ! mon oeil est savant et depuis plus d'un jour,
    Et ce n'est...

  • Ô délices d'amour ! et toi, molle paresse,
    Vous aurez donc usé mon oisive jeunesse !
    Les belles sont partout. Pour chercher les beaux-arts,
    Des Alpes vainement j'ai franchi les remparts :
    Rome d'amours en foule assiége mon asile.
    Sage vieillesse, accours ! Ô déesse tranquille,
    De ma jeune saison éteins ces feux brûlants,
    Sage vieillesse ! Heureux qui...

  • Je dirai l'innocence en butte à l'imposture,
    Et le pouvoir inique, et la vieillesse impure,
    L'enfance auguste et sage, et Dieu, dans ses bienfaits,
    Qui daigne la choisir pour venger les forfaits.
    Ô fille du Très-Haut, organe du génie,
    Voix sublime et touchante, immortelle harmonie,
    Toi qui fais retentir les saints échos du ciel
    D'hymnes que vont...

  • Tout homme a ses douleurs. Mais aux yeux de ses frères
    Chacun d'un front serein déguise ses misères.
    Chacun ne plaint que soi. Chacun dans son ennui
    Envie un autre humain qui se plaint comme lui.
    Nul des autres mortels ne mesure les peines,
    Qu'ils savent tous cacher comme il cache les siennes ;
    Et chacun, l'oeil en pleurs, en son coeur douloureux
    Se...

  • L'art, des transports de l'âme est un faible interprète ;
    L'art ne fait que des vers, le coeur seul est poëte.
    Sous sa fécondité le génie opprimé
    Ne peut garder l'ouvrage en sa tête formé.
    Soit que le doux amour des nymphes du Permesse,
    D'une fureur sacrée enflammant sa jeunesse,
    L'emporte malgré lui dans leurs riches déserts,
    Où l'air est poétique et...

  • Il n'est que d'être roi pour être heureux au monde.
    Bénis soient tes décrets, ô Sagesse profonde !
    Qui me voulus heureux et, prodigue envers moi,
    M'as fait dans mon asile et mon maître et mon roi.
    Mon Louvre est sous le toit, sur ma tête il s'abaisse ;
    De ses premiers regards l'orient le caresse.
    Lit, sièges, table, y sont, portant de toutes parts
    ...

  • Oh ! puisse le ciseau qui doit trancher mes jours
    Sur le sein d'une belle en arrêter le cours !
    Qu'au milieu des langueurs, au milieu des délices,
    Achevant de Vénus les plus doux sacrifices,
    Mon âme, sans efforts, sans douleurs, sans combats,
    Se dégage et s'envole, et ne le sente pas !
    Qu'attiré sur ma tombe, où la pierre luisante
    Offrira de ma fin l'...