• Ta rose de pourpre, à ton clair soleil,
    O Juin, étincelle enivrée ;
    Penche aussi vers moi ta coupe dorée :
    Mon coeur à ta rose est pareil.

    Sous le mol abri de la feuille ombreuse
    Monte un soupir de volupté ;
    Plus d'un ramier chante au bois écarté,
    O mon coeur, sa plainte amoureuse.

    Que ta perle est douce au ciel parfumé,
    Etoile de la...

  • L 'aigle noir aux yeux d'or, prince du ciel mongol,
    Ouvre, dès le premier rayon de l'aube claire,
    Ses ailes comme un large et sombre parasol.

    Un instant immobile, il plane, épie et flaire.
    Là-bas, au flanc du roc crevassé, ses aiglons
    Érigent, affamés, leurs cous au bord de l'aire.

    Par la steppe sans fin, coteau, plaine et vallons,
    L'oeil...

  • Je dirai la rose aux plis gracieux.
    La rose est le souffle embaumé des Dieux,
    Le plus cher souci des Muses divines.
    Je dirai ta gloire, ô charme des yeux,
    Ô fleur de Kypris, reine des collines !
    Tu t'épanouis entre les beaux doigts
    De l'Aube écartant les ombres moroses ;
    L'air bleu devient rose, et roses les bois ;
    La bouche et le sein des...

  • Ville au bouclier d'or, favorite des Dieux,
    Toi que bâtit la Lyre aux sons mélodieux,
    Toi que baigne Dirkè d'une onde inspiratrice,
    D'Hèraclès justicier magnanime nourrice,
    Thèbes ! - Toi qui contins entre tes murs sacrés
    Le Dieu né de la foudre, aux longs cheveux dorés,
    Ceint de pampre, Iakkhos, qui, la lèvre rougie,
    Danse, le thyrse en main, aux monts...

  • O mon cher rouet, ma blanche bobine,
    Je vous aime mieux que l'or et l'argent !
    Vous me donnez tout, lait, beurre et farine,
    Et le gai logis, et le vêtement.
    Je vous aime mieux que l'or et l'argent,
    O mon cher rouet, ma blanche bobine !

    O mon cher rouet, ma blanche bobine,
    Vous chantez dès l'aube avec les oiseaux ;
    Eté comme hiver, chanvre ou laine...

  • Ô jeune cavale, au regard farouche,
    Qui cours dans les prés d'herbe grasse emplis,
    L'écume de neige argente ta bouche,
    La sueur ruisselle à tes flancs polis.
    Vigoureuse enfant des plaines de Thrace,
    Tu hennis au bord du fleuve mouvant,
    Tu fuis, tu bondis, la crinière au vent :
    Les daims auraient peine à suivre ta trace.
    Mais bientôt, ployant sur...

  • Un monde mort, immense écume de la mer,
    Gouffre d'ombre stérile et de lueurs spectrales,
    Jets de pics convulsifs étirés en spirales
    Qui vont éperdument dans le brouillard amer.

    Un ciel rugueux roulant par blocs, un âpre enfer
    Où passent à plein vol les clameurs sépulcrales,
    Les rires, les sanglots, les cris aigus, les râles
    Qu'un vent sinistre arrache...

  • Certes, ce monde est vieux, presque autant que l'enfer.
    Bien des siècles sont morts depuis que l'homme pleure
    Et qu'un âpre désir nous consume et nous leurre,
    Plus ardent que le feu sans fin et plus amer.

    Le mal est de trop vivre, et la mort est meilleure,
    Soit que les poings liés on se jette à la mer,
    Soit qu'en face du ciel, d'un oeil ferme, et sur l'heure...

  • À l'ombre des rosiers de sa fraîche terrasse,
    Sous l'ample mousseline aux filigranes d'or,
    Djihan-Guîr, fils d'Akbar, et le chef de sa race,
    Est assis sur la tour qui regarde Lahor.

    Deux Umrahs sont debout et muets, en arrière.
    Chacun d'eux, immobile en ses flottants habits,
    L'oeil fixe et le front haut, tient d'une main guerrière
    Le sabre d'acier...

  • Elle passe, tranquille, en un rêve divin,
    Sur le bord du plus frais de tes lacs, ô Norvège !
    Le sang rose et subtil qui dore son col fin
    Est doux comme un rayon de l'aube sur la neige.

    Au murmure indécis du frêne et du bouleau,
    Dans l'étincellement et le charme de l'heure,
    Elle va, reflétée au pâle azur de l'eau
    Qu'un vol silencieux de papillons...