• Puis qu'ainsi sont mes dures destinees,
    J'en saouleray, si je puis, mon soucy,
    Si j'ay du mal, elle le veut aussi :
    J'accompliray mes peines ordonnees.

    Nymphes des bois, qui avez, estonnees,
    De mes douleurs, je croy, quelque mercy,
    Qu'en pensez-vous ? Puis-je durer ainsi,
    Si à mes maux tresves ne sont donnees ?

    Or si quelqu'une à m'...

  • J'ay tant vescu, chetif, en ma langueur,
    Qu'or j'ay veu rompre, et suis encor en vie.
    Mon esperance avant mes yeulx ravie,
    Contre l'escueil de sa fiere rigueur.

    Que m'a servy de tant d'ans la longueur ?
    Elle n'est pas de ma peine assouvie :
    Elle s'en rit, et n'a point d'aultre envie
    Que de tenir mon mal en sa vigueur.

    Doncques j'auray,...

  • Ce sont tes yeux tranchans qui me font le courage.
    Je veoy saulter dedans la gaïe liberté,
    Et mon petit archer, qui mene à son costé
    La belle gaillardise et plaisir le volage ;

    Mais apres, la rigueur de ton triste langage
    Me monstre dans ton coeur la fiere honesteté ;
    Et, condemné, je veoy la dure chasteté
    Là gravement assise et la vertu sauvage....

  • J'ay un Livre Thuscan, dont la tranche est garnie
    Richement d'or battu de l'une et l'autre part ;
    Le dessus reluit d'or ; et au dedans est l'art
    Du comte Balthasar, de la Contisanie.

    Où que je sois, ce livre est en ma compagnie.
    Aussi c'est un present de celle qui depart
    A tout ce qu'elle voit, à ce qui d'elle part,
    Quelque part, quelque ray de...

  • Ô l'ai je dict ? helas ! l'ai je songé ?
    Ou si, pour vrai, j'ai dict blaspheme telle ?
    Ça, faulce langue, il faut que l'honneur d'elle,
    De moi, par moi, desus moy, soit vangé.

    Mon coeur chez toi, ô Madame, est logé :
    Là donne lui quelque geine nouvelle,
    Fais luy souffrir quelque peine cruelle ;
    Fais, fais lui tout, fors lui donner congé.
    ...

  • Ores je te veux faire un solennel serment,
    Non serment qui m'oblige à t'aimer d'avantage,
    Car meshuy je ne puis ; mais un vray tesmoignage
    A ceulx qui me liront, que j'aime loyaument.

    C'est pour vray, je vivray, je mourray en t'aimant.
    Je jure le hault ciel, du grand Dieu l'heritage,
    Je jure encor l'enfer, de Pluton le partage,
    Où les parjurs...

  • "Je sçay ton ferme cueur, je cognois ta constance :
    Ne sois point las d'aimer, et sois seur que le jour,
    Que mourant je lairray nostre commun sejour,
    Encor mourant, de toy j'auray la souvenance.

    J'en prens tesmoing le Dieu qui les foudres eslance,
    Qui ramenant pour nous les saisons à leur tour,
    Vire les ans legers d'un eternel retour,
    Le Dieu qui...

  • Quand celle j'oy parler qui pare nostre France,
    Lors son riche propos j'admire en escoutant ;
    Et puis s'elle se taist, j'admire bien autant
    La belle majesté de son grave silence.

    S'elle escrit, s'elle lit, s'elle va, s'elle dance,
    Or je poise son port, or son maintien constant,
    Et sa guaye façon ; et voir en un instant
    De çà de là sortir mille...

  • Quant à chanter ton los par fois je m'adventure,
    Sans ozer ton grand nom dans mes vers exprimer,
    Sondant le moins profond de ceste large mer,
    Je tremble de m'y perdre, et aux rives m'assure ;

    Je crains, en loüant mal, que je te face injure.
    Mais le peuple, estonné d'ouir tant t'estimer,
    Ardant de te cognoistre, essaie à te nommer,
    Et, cerchant ton...

  • Ou soit lors que le jour le beau Soleil nous donne,
    Ou soit quand la nuict oste aux choses la couleur,
    Je n'ay rien en l'esprit que ta grande valeur,
    Et ce souvenir seul jamais ne m'abandonne.

    A ce beau souvenir tout entier je me donne,
    Et s'il tire avec soy tousjours quelque douleur,
    Je ne prens point cela toutefois pour malheur,
    Car d'un tel...