• ... Mais quoi ! déjà les Cieux s'accordent à pleurer,
    Le soleil s'obscurcit, une amère rosée
    Vient de gouttes de fiel la terre énamourer,
    D'un crêpe noir la lune en gémit déguisée,
    Et tout pour mon amour veut ma mort honorer.

    Au plus haut du midi, des étoiles les feux,
    Voyant que le soleil a perdu sa lumière,
    Jettent sur mon trépas leurs...

  • Mille baisers perdus, mille et mille faveurs,
    Sont autant de bourreaux de ma triste pensée,
    Rien ne la rend malade et ne l'a offensée
    Que le sucre, le ris, le miel et les douceurs.

    Mon coeur est donc contraire à tous les autres coeurs,
    Mon penser est bizarre et mon âme insensée
    Qui fait présente encor' une chose passée,
    Crevant de désespoir le fiel...

  • Nous ferons, ma Diane, un jardin fructueux :
    J'en serai laboureur, vous dame et gardienne.
    Vous donnerez le champ, je fournirai de peine,
    Afin que son honneur soit commun à nous deux.

    Les fleurs dont ce parterre éjouira nos yeux
    Seront vers florissants, leurs sujets sont la graine,
    Mes yeux l'arroseront et seront sa fontaine
    Il aura pour zéphyrs mes...

  • Dans le parc de Thalcy, j'ai dressé deux plançons
    Sur qui le temps faucheur ni l'ennuyeuse estorse*
    Des filles de la nuit jamais n'aura de force,
    Et non plus que mes vers n'éteindra leurs renoms.

    J'ai engravé dessus deux chiffres nourrissons
    D'une ferme union qui, avec leur écorce,
    Prend croissance et vigueur, et avecq'eux s'efforce
    D'accroître l'...

  • A l'éclair violent de ta face divine,
    N'étant qu'homme mortel, ta céleste beauté
    Me fit goûter la mort, la mort et la ruine
    Pour de nouveau venir à l'immortalité.

    Ton feu divin brûla mon essence mortelle,
    Ton céleste m'éprit et me ravit aux Cieux,
    Ton âme était divine et la mienne fut telle :
    Déesse, tu me mis au rang des autres dieux.

    ...

  • Sort inique et cruel ! le triste laboureur
    Qui s'est arné* le dos à suivre sa charrue,
    Qui sans regret semant la semence menue
    Prodigua de son temps l'inutile sueur,

    Car un hiver trop long étouffa son labeur,
    Lui dérobant le ciel par l'épais d'une nue,
    Mille corbeaux pillards saccagent à sa vue
    L'aspic demi pourri, demi sec, demi mort.
    ...

  • Ô divine Inconstance, aie pitié de moi
    Guéris en me blessant ma plaie et mon émoi,
    Pardonne le dépit de mon âme pressée,
    Pardonne-lui les maux qu'au premier offensée,
    Elle a vomi sur toi frénétique en courroux.
    Change sa volonté, ton nom lui sera doux,
    Et comme j'ai tourné le médire en louange,
    Fais qu'un coeur amoureux à n'aimer plus se change.
    ...

  • Enfants de vanité, qui voulez tout poli,
    qui le style saint ne semble assez joli,
    Qui voulez tout coulant, et coulez périssables
    Dans l'éternel oubli, endurez mes vocables
    Longs et rudes ; et, puisque les oracles saints
    Ne vous émeuvent pas, aux philosophes vains
    Vous trouverez encore, en doctrine cachée,
    La résurrection par leurs écrits prêchée.
    ...

  • ... Quand mon esprit jadis sujet à ta colère
    Aux Champ Élysiens achèvera mes pleurs,
    Je verrai les amants qui de telle misère
    Goûtèrent tels repos après de tels malheurs,
    Tes semblables aussi que leur sentence même
    Punit incessamment en Enfer creux et blême,

    A quiconques aura telle dame servie
    Avec tant de rigueur et de fidélité,
    J'égalerai ma...

  • Vous qui avez écrit qu'il n'y a plus en terre
    De nymphe porte-flèche errante par les bois,
    De Diane chassante, ainsi comme autrefois
    Elle avait fait aux cerfs une ordinaire guerre,

    Voyez qui tient l'épieu ou échauffe l'enferre ?
    Mon aveugle fureur, voyez qui sont ces doigts
    D'albâtre ensanglantés, marquez bien le carquois,
    L'arc et le dard meurtrier, et...