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    Harpes d’Éden, chantez le bonheur immortel !
    Une extase de feu monte de chaque autel,
    Et les sept cieux, brûlant autour du divin maître,
    Sont un temple d’hymen dont lui-même est le prêtre.
    Mais parmi ces élus, ces trônes, ces ardeurs,
    Qui du chaste anneau d’or échangent les splendeurs,
    Sous la belle lumière amoureuse et flottante,
    Des mystiques...

  • RENCONTRE

    Il est, aux bords déserts du canal Mozambique,
    Une lisière étroite aux pentes du rocher,
    Un rivage sans nom, d’aspect morne et tragique,
    Dont les vaisseaux en mer n’osent pas s’approcher.

    Gomme un rideau tendu, la montagne l’ombrage ;
    Jusqu’au niveau de l’onde, abrupte, elle descend.
    Qui s’égare par là...

  • Qu'est il besoing de tant la Paix crier
    Par les cantons des villes et villettes ?
    Qu'est il besoing d'huissiers ne de trompettes
    Pour la Paix faicte en France publier ?

    Il vaudroit mieux, en criant, Dieu prier
    Qu'il la gardast de troubles inquietes ;
    Il vaudroit mieux en chantant chansonnettes,
    Vive le Roy porte-paix, s'escrier.

    Sans...

  • I

    Dans ma cervelle se promène
    Ainsi qu'en son appartement,
    Un beau chat, fort, doux et charmant.
    Quand il miaule, on l'entend à peine,

    Tant son timbre est tendre et discret ;
    Mais que sa voix s'apaise ou gronde,
    Elle est toujours riche et profonde.
    C'est là son charme et son secret.

    Cette voix, qui perle et qui filtre
    Dans...

  • A la pâle clarté des lampes languissantes,
    Sur de profonds coussins tout imprégnés d'odeur
    Hippolyte rêvait aux caresses puissantes
    Qui levaient le rideau de sa jeune candeur.

    Elle cherchait, d'un oeil troublé par la tempête,
    De sa naïveté le ciel déjà lointain,
    Ainsi qu'un voyageur qui retourne la tête
    Vers les horizons bleus dépassés le matin.
    ...

  • ... Ah ! fille sans amour, ou du moins sans constance,
    Pourquoy paissant mon coeur d'une vaine espérance,
    Me juras-tu jamais que mon feu te plaisoit,
    Et qu'un mesme desir ta poitrine embrasoit ?
    Pourquoy soufflant l'ardeur de ma flamme insensée
    M'asseuras-tu jamais que j'estois ta pensée :
    Et que ta seule amour bruslant trop vivement
    Ne nous permettoit point...

  • ... Voici la mort du ciel en l'effort douloureux
    Qui lui noircit la bouche et fait saigner les yeux.
    Le Ciel gémit d'ahan ; tous ses nerfs se retirent ;
    Ses poumons près à près sans relâche respirent.
    Le Soleil vêt de noir le bel or de ses feux ;
    Le bel oeil de ce monde est privé de ses yeux.
    L'âme de tant de fleurs n'est plus épanouie ;
    Il n'y a plus...

  • O combien est heureux
    Celui qui se contente
    Des biens si plantureux
    Que nature présente !
    Autres biens que ceux-ci
    Sont meslés de souci.

    J'ai toute suffisance
    Que la vie requiert:
    Qui abonde en chevance
    Pour autrui en acquiert.
    Trésors En vain sont amassés.

    Qui se fonde en l'honneur,
    A Fortune se joue,
    Qui...

  • Mon Dieu ! si elle allait mourir !
    Si la pelle allait la couvrir,
    Avec son bec de bois qui ramasse la terre,
    Si sa soeur ou son frère,
    Pour la pleurer allaient venir !

    Si la cloche toujours au guet
    Allait donner sa voix qui fait :
    Mort-mort, mort-mort, en hochant de la tête ;
    Et que le fossoyeur fit fête,
    Assis au bord de son creux fait !...

  • Je les ai vus, je les ai vus,
    Ils passaient, par les sentes,
    Avec leurs yeux, comme des fentes,
    Et leurs barbes, comme du chanvre.

    Deux bras de paille,
    Un dos de foin,
    Blessés, troués, disjoints,
    Ils s'en venaient des loins,
    Comme d'une bataille.

    Un chapeau mou sur leur oreille,
    Un habit vert comme l'oseille ;
    Ils étaient deux...