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    C’était au temps
    Où les grands Dieux de marbre et d’or
    Ne vivaient plus qu’en leurs statues ;
    On les voyait encor,
    Debout et nues,
    Au seuil des temples clairs
    A tuiles d’or,
    Avec la mer
    Derrière eux, éclatante, innombrable et sereine,
    A l’horizon...

    C’est ainsi que je les ai vus, étant petit,
    Figures vaines
    Dont...

  • Laisse la porte ouverte à tous, qu'un autre tente
    De rallumer à l'âtre où le feu s'est éteint
    La broussaille épineuse et la pomme de pin;
    Leur cendre fut jadis une flamme vivante.

    Tu as passé le seuil que fuit ta vie errante;
    Ne te retourne pas vers le passé; ta main,
    De ta lampe penchée, éclairerait en vain
    L'obscur sommeil qui...

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    Avec des mains de haine et de colère, Amour !
    J’ai rompu rudement à mon genou farouche
    Le beau cep qui porta la grappe dont toujours
    Le goût voluptueux se ravive à ma bouche ;

    Et j’ai fait, tout ce jour, des treilles de ma vie
    Brûler le sarment sec et la feuille séchée
    Pour qu’il n’en reste au soir que la cendre et la suie
    Qui demeurent après...

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    La corbeille, la pannetière et le ruban
    Nouant la double flûte à la houlette droite,
    Le médaillon ovale où la moulure étroite
    Encadre un profil gris dans le panneau plus blanc ;

    La pendule hâtive et l’horloge au pas lent
    Où l’heure, tour à tour, se contrarie et boite ;
    Le miroir las qui semble une eau luisante et moite,
    La porte entrebâillée...

  • Le jardin rit au fleuve et le fleuve soupire
    Du regret éternel de sa rive qu'il fuit,
    La glycine retombe et se penche vers lui,
    Le lilas s'y reflète et le jasmin s'y mire.

    Le liseron s'élance et le lierre s'étire;
    Un bouton qui germait est corolle aujourd'hui;
    L'héliotrope embaume l'ombre et chaque nuit
    Entr'ouvre un lys de plus pour l'aube qui l'...

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    Le cuivre du trophée et le bronze du buste
    Juxtaposent l’or jaune et la patine verte ;
    Le carquois se suspend près de la corne ouverte,
    Cérès en fleurs sourit à Diane robuste.

    Le parquet de bois clair mire la fresque inverse
    Où trône le Héros que la Victoire illustre ;
    L’éclair silencieux rôde de lustre en lustre,
    Et le soleil s’irise au...

  • La Mer écume et gronde autour de l'âpre îlot
    Que tourmente le vent et harcèle le flot.
    Je n'entends pas la mer, mais je sais qu'elle est là;
    C'est elle dont la force en sa rumeur roula
    Sur cette aride plage et jusques à tes pieds
    Les durs galets polis sur lesquels tu t'assieds,
    Philoctète ! et voici l'arc courbe et le carquois
    Et la...

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    « Toi qui dans l’air léger lances d’un souffle pur
    La chanson de ta flûte en gammes vers l’azur
    Et qui, longtemps assis devant la mer sacrée,
    L’admires, tour à tour, rose à peine ou pourprée,
    Quand le soleil se lève ou tombe à l’horizon ;
    O toi, qui, pour rentrer, le soir, en ta maison,
    Suis ce sentier charmant qui va par la prairie
    Et qui s’...

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    Sur l’eau verte, bleue ou grise,
    Des canaux et du canal,
    Nous avons couru Venise
    De Saint-Marc à l’Arsenal.

    Au vent vif de la lagune
    Qui l’oriente à son gré
    J’ai vu tourner ta Fortune,
    O Dogana di Mare !

    Souffle de l’Adriatique,
    Brise molle ou sirocco,
    Tant pis, si son doigt m’indique
    La Cà d’Or ou San Rocco !

    ...

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    La double rampe, auprès du bassin que surplombe
    La terrasse de marbre où le buis nu serpente,
    Incurve sa montée et courbe sa descente,
    Et de la vasque en pleurs sanglote l’eau qui tombe.

    La corneille criarde et la blanche colombe
    Alternent, l’une rauque et l’autre gémissante ;
    Chaque cyprès, le long de cette double pente,
    Figure un cippe noir...