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    Par quelle fantaisie insolite et malsaine
    En vins-je à grimacer devant ma glace, un soir,
    Un soir de fin d’automne où Paris, morne et noir
    Pompait lugubrement les brouillards de la Seine ?

    Le fait est que mêlant la tendresse à la haine,
    La rage à la stupeur, le rire au désespoir,
    Ma physionomie en face du miroir
    Passa par tous les tons de la...

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    Il tète avec avidité
    Et se cogne au sein qu’il enlace ;
    Puis, lorsque sa nourrice est lasse,
    Il dort sur son ventre ouaté.

    Pour le minet doux et futé
    C’est un lit que rien ne remplace !
    Il tète avec avidité
    Et se cogne au sein qu’il enlace.

    Quand il s’est bien lissé, gratté,
    Pris la queue et vu dans la glace,
    Après ses...

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    Sous la pluvieuse lumière,
    Dans l’air si glacé, la chaumière,

    Non loin d’un marais insalubre,
    Est lamentablement lugubre.

    Au-dedans, c’est tant de misère
    Que d’y penser le cœur se serre !

    De chaque solive minée,
    Du grand trou de la cheminée

    Dont le foyer large est tout vide,
    Le froid tombe en un jour livide ;

    Et la bise...

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    Le ciel ayant figé ses grands nuages roses,
    Émeraudés, lilas, cuivreux et violets,
    L’étang clair, miroitant dans la douceur des choses,
    Renvoya leur image avec tous ses reflets.

    Dans l’onde, sous le souffle errant des vents follets,
    Gardant leur infini, leurs airs d’apothéoses,
    Leur éclat, leur magique et leur lointain complets,
    Ils dormaient...

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    En face d’un miroir est une femme étrange
    Qui tire une perruque où l’or brille à foison,
    Et son crâne apparaît jaune comme une orange
    Et tout gras des parfums de sa fausse toison.
     
    Sous des lampes jetant une clarté sévère
    Elle sort de sa bouche un râtelier ducal,
    Et de l’orbite gauche arrache un œil de verre
    Qu’elle met avec soin dans un...

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    Ceux que l’œil du public outrage,
    — Noyés, pendus, assassinés, —
    Ils sont là, derrière un vitrage,
    Sur des lits de marbre inclinés.

    Des robinets de cuivre sale
    Font leur bruit monotone et froid
    Au fond de la terrible salle
    Pleine de silence et d’effroi.

    À la voûte, un tas de défroques
    Pend, signalement empesté :
    Haillons...

  • La nature, au printemps, semble par sa féerie
    Glorifier tous les trépas qu’elle a conçus.
    Passe un enterrement ? elle répand dessus
    Son parfum, sa musique et sa grâce fleurie.

    On dirait qu’elle veut que chaque arbre sourie
    Aux mignonnets cercueils des tout petits Jésus,
    Que ces panaches, d’ombre et de vapeur tissus,
    Célèbrent la candeur de leur âme...

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    L’âme des fougères s’envole :
    Plus de lézards entre les buis !
    Et sur l’étang froid comme un puits
    Plus de libellule frivole !

    La feuille tourne et devient folle,
    L’herbe songe aux bluets enfuis.
    L’âme des fougères s’envole :
    Plus de lézards entre les buis !

    Les oiseaux perdent la parole,
    Et par les jours et par les nuits,
    ...

  • Moi, qui l’avais vu si petit,
    Je fus tout chagrin de sa perte,
    Et cette pauvre masse inerte
    Ne m’inspira nul appétit.

    Lorsque chacun se divertit
    Et festoya dans l’herbe verte,
    Moi, qui l’avais vu si petit,
    Je fus tout chagrin de sa perte.

    Mais la porchère compatit
    À son sort, dans la cour déserte,
    Car, en voyant sa bête ouverte,...

  • Miné de chagrin, l’homme croule
    Près du lit à baldaquin bleu
    Où sa femme gît au milieu
    Sous le drap tendu qui la moule.

    Voilà que son doux orphelin
    Monte sur une chaise, et câlin,
    Passe ses mains d’étrange sorte
    Sur la figure de la morte.

    Le père tressaille — il a peur…
    Et, défigé de sa stupeur
    Devant la forme longue et roide,

    ...