• Malgré le froid, le ciel est en fête, et l’azur,
    Pâle encore, adoucit la lumière adorable ;
    Penché sur l’horizon, le soleil favorable
    Se répand et ne laisse aucun détail obscur.

    La colline montrant au loin sur un fond pur
    Le profil dépouillé d’un saule ou d’un érable,
    Abrite des maisons blanches, et sur le sable
    De la grève un vieux banc se chauffe...

  • Dans un parc oublié dont le silence amorce
    Les rêveurs, sentinelle ancienne du seuil,
    Le grand arbre muet isole son orgueil,
    Et vers le ciel étend ses branches avec force.

    Son tronc noir se raidit musculeux comme un torse,
    Et son cœur dépouillé ferait un bon cercueil.
    Il a l’air de porter l’empreinte d’un long deuil,
    Et l’âge a sillonné profondément l...

  • Une habitude longue et douce lui faisait
    Aimer pendant l’hiver les violettes blanches ;
    A l’agrafe du châle un peu court sur les hanches
    Son doigt fin, sentant bon comme elles, les posait.

    Un jour que le soleil piquant et clair grisait
    Les moineaux francs criant par terre et dans les branches,
    Elle me proposa d’aller tous les dimanches
    Cueillir avec l...

  • A travers le réseau des branches que l’hiver
    Trace avec la vigueur des dessins à la plume,
    La lune, comme un feu qui dans le ciel s’allume,
    Montait, luisant au bord du bois couleur de fer.

    Tu manquais à mon bras, mignonne, et ton pied cher
    A qui marcher fait mal et qui n’a pas coutume
    D’aller loin, sur la bande étroite du bitume
    Ne faisait pas crier...

  • Le grand cintre de l’arche encadre un clair tableau.
    En attendant Avril et pour la bienvenue
    Des fleurs, le ciel sourit et le froid s’atténue.
    Au premier plan, la rive en pente douce, et l’eau.

    Peinte légèrement du bout d’un fin pinceau,
    Profilant sur l’azur sa silhouette nue,
    Une ile, avec des airs de baigneuse ingénue,
    Sort du fleuve, et les joncs...

  • Comme la main distraite et qui n’a pas de thème
    Précis, par la vertu secrète d’un aimant,
    Décrit, sans y songer et machinalement,
    Un contour au hasard jeté, toujours le même ;

    Ainsi va ma pensée, et l’éternel problème
    De l’amour la ramène à tracer constamment
    Dans le cadre naïf d’un ovale charmant
    Un sourire indécis et les chers yeux que j’aime.

    ...
  • L’ombre bleuâtre & claire au milieu des allées,
    Comme un long voile plein de taches étoilées,
    Cache à peine la terre & flotte avec douceur ;
    Le soleil, en rayant la légère épaisseur,

    Forme des réseaux d’or où palpitent mes rêves.
    Les frênes aux bourgeons rouges du sang des séves
    Frissonnent. Les bouleaux, à leur feuillage blanc
    Prenant la...

  • La lisière du bois suit le petit chemin
    D’ocre jaune, où tout pli rit d’une graminée.
    La pente, pleine d’air, est comme illuminée
    D’un lever d’ailes d’or, de soufre & de carmin.

    Vrilles des liserons glissant leur verte main,
    Éphémères d’un soir ou d’une matinée ;
    Toute la flore exquise, humble, indéterminée
    De l’herbe, amours d’hier, semences de...

  • Tiède du souvenir des occidents vermeils,
    La nuit sur les coteaux palpite immense & bonne.
    Elle est comme la mer : un vent d’aile y frissonne ;
    Leur couleur est semblable & leurs bruits sont pareils.

    Le sein large & profond qui porte les soleils,
    Où le flot incessant des univers rayonne,
    Est indulgent & n’a d’embûches pour personne,
    Et...

  • Nos coteaux, les plus purs de tous & les plus doux,
    Que, n’eût été la Grèce, auraient choisis les faunes,
    Au bas de leurs sentiers poudrés de sables jaunes
    Ont comme une hydre énorme éparse à leurs genoux.

    La Ville nous fascine, étant moins près de nous,
    Avec ses tours aussi royales que des trônes ;
    Horizontale, bleue & blanche entre les cônes...