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    Tu marches soucieux, mon pauvre capitaine.
    Par les noirs défilés d’une sierra lointaine,
    Bien au delà des mers, dans un pays perdu.
    Une larme parfois roule au creux de tes joues
    Tandis que, grelottant de fièvre, tu secoues
    Ton caban lourd de pluie et par les vents tordu.

    Simple comme un héros des antiques légendes,
    Jeune homme vénéré de ceux...

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    À René Vallery-Radot.

    I

    Les anciens voyageurs, qui marchaient assez vite
    Quand cinq gros percherons galopaient à la fois
    En Lorraine trouvaient bonne table et bon gîte
    Au bord d’un grand chemin allongé dans les bois.

    C’était à Saint-Hubert. — On voyait en peinture,
    Sur l’enseigne, un chasseur et sa meute en arrêt
    Devant un cerf...

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    À Louis Molani.

    LES HIRONDELLES.

    Quel est votre pays, beaux voyageurs du ciel,
    Qui, défilant si haut, fuyez à tire-d’aile ?

    LES CYGNES.

    Le pays où fleurit le myrthe et l’asphodèle,
    L’Orient. — Nous quittons la Grèce et l’Archipel.

    LES HIRONDELLES.

    Et vous allez au Nord ?

    LES CYGNES.

    ...
  • Si je suis reine au bal dans ma rote traînante,
    Noyant mon petit pied dans un flot de velours ;
    Je suis belle en sortant de mes grands cerceaux lourds.
    Je n’ai rien à gagner dans leur prison gênante.

    Voyant mes cheveux d’or ondoyer sur mes reins,
    La Vénus à la conque aurait pâli d’envie.
    Comme elle, sur les eaux, tritons et dieux marins,
    Tout...

  • J’obéis aux vouloirs d’une fille aux yeux pers.
    En regardant ses yeux, je pense aux mers profondes
    Dont l’abîme inconnu désespère les sondes :
    Si je veux lire au fond de ses yeux, je m’y perds.

    Qui jamais résoudra le bizarre problème
    De son cœur ?… Est-ce moi, qui ne m’explique rien
    Quand je veux essayer de voir clair dans le mien,
    Et qui reste une...

  • Le sourire est en fleur sur les lèvres des belles,
    Dans la saison d’avril et des robes nouvelles. —
    Salut, ô rubans clairs, guimpes et cols brodés,
    Bonnets aériens !… toute la panoplie
    Révélant le bon goût d’une femme accomplie
    Traîne sur les fauteuils. — Les tiroirs sont vidés.

    C’est la fin d’un grand deuil. — La veuve blanche et rose
    Travaille avec...

  • Le soleil s’est levé rouge comme une sorbe
    Sur un étang des bois : — il arrondit son orbe
    Dans le ciel embrumé comme un astre qui dort ;
    Mais le voilà qui monte en éclairant la brume,
    Et le premier rayon qui brusquement s’allume
    A toute la forêt donne des feuilles d’or.

    Et sur les verts tapis de la grande clairière,
    Ferme dans ses sabots, marche en...

  • Le présent, le passé, l’avenir d’une femme,
    Des gens fort sérieux prétendent tout avoir.
    Ils prendraient volontiers son image au miroir,
    Au papillon son aile, au diamant sa flamme.

    Dans l’abîme insondable ils aimeraient à voir,
    Avec leurs gros yeux ronds, ces bourgeois de vieux drame,
    La perle blanche éclose aux profondeurs de l’âme,
    Ils seraient...

  • Les amoureux ne vont pas loin :
    On perd du temps aux longs voyages.
    Les bords de l’Yvette ou du Loing
    Pour eux ont de frais paysages.

    Ils marchent à pas cadencés
    Dont le cœur règle l’harmonie,
    Et vont l’un à l’autre enlacés
    En suivant leur route bénie.

    Ils savent de petits sentiers
    Où les fleurs de mai sont écloses ;
    Quand ils...

  • J’aime tes belles mains longues & paresseuses,
    Qui, pareilles au lis, n’ont jamais travaillé,
    Mais savent le secret des musiques berceuses
    Qui parlent à voix lente au cœur émerveillé. —
    J’aime tes belles mains longues & paresseuses.

    J’aime tes petits pieds vifs & spirituels,
    Petits pieds éloquents de la cheville aux pointes,
    Que les saints...