• Quelquefois je suis plein de grandes voix anciennes,
    Et je revis un peu l’enfance en la villa ;
    Je me retrouve encore avec ce qui fut là
    Quand le soir nous jetait de l’or par les persiennes.

    Et dans mon âme alors soudain je vois groupées
    Mes sœurs à cheveux blonds jouant près des vieux feux ;
    Autour d’elles le chat rôde, le dos frileux,
    Les regardant...

  •  

    Donc, ta voix de bronze est éteinte:
    Te voilà muet à jamais !
    L’heure plus ne vibre ou ne tinte
    Dans la grand’salle que j’aimais,

    Où je venais, après l’étude,
    Fumer le soir, rythmant des vers,
    Où l’abri du monde pervers
    Éternisant ma solitude.

    Sur le buffet aux tons noircis
    De chêne très ancien, ton ombre
    Lamente-t-elle,...

  •  

    Ce frêle soulier gris et or,
    Aux boucles de soie embaumée,
    Tel un mystérieux camée,
    Entre mes mains, ce soir, il dort.

    Tout à l’heure je le trouvai
    Gisant au fond d’une commode...
    Petit soulier d’ancienne mode,
    Soulier du souvenir... Ave ! -

    Depuis qu’elle s’en est allée,
    Menée aux marches de Chopin,
    Dormir pour jamais...

  •  

    Nous nous serrions, hagards, en silencieux gestes,
    Aux flamboyants juins d’or, pleins de relents, lassés,
    Et tels, rêvassions-nous, longuement en enlacés,
    Par les grands soirs tombés, triomphalement prestes.

    Debout au perron gris, clair-obscuré d’agrestes
    Arbres évaporant des parfums opiacés,
    Et d’où l’on constatait des marbres déplacés,
    ...

  •  

    Vois-tu près des cohortes bovines
    Choir les feuilles dans les ravines,
    Dans les ravines ?

    Vois-tu sur le côteau des années
    Choir mes illusions fanées,
    Toutes fanées ?

    Avec quelles rageuses prestesses
    Court la bise de...

  •  

    Alors qu’il nous eût fui le grand vent des hivers,
    Aux derniers ciels pâlis de mars, nous la menâmes
    Dans le hallier funèbre aux odeurs de cinnames,
    Où germaient les soupçons de nouveaux plants rouverts.

    De hauts rameaux étaient criblés d’oiseaux divers
    Et de tristes soupirs gonflaient leurs jeunes âmes.
    Au limon moite et brut où nous la...

  •  

    Les yeux hagards, la joue pâlie,
    Mais le cœur ferme et sans regret,
    Dans sa mansarde d’Italie
    Le divin Corrège expirait.

    Autour de l’atroce grabat,
    La bonne famille du maître
    Cherche un peu de sa vie à mettre
    Dans son cœur à peine qui bat.

    Mais la vision cérébrale
    Fomente la fièvre du corps,
    Et son âme qu’agite un râle,...

  •  

    Dors, fouillis vénéré de vieilles porcelaines
    Froides comme des yeux de morts, tous clos, tous froids,
    Services du Japon qui disent l’autrefois
    De maints riches repas de belles châtelaines !

    Ton bois a des odeurs moites d’anciennes laines,
    Parfums de choses d’or aux fragiles effrois;
    Tes tasses ont causé sur des lèvres de rois
    De leurs Hébés...

  •  

    Près de ses pots de fleurs, à l’abri des frimas,
    Assise à la fenêtre, et serrant autour d’elle
    Son châle japonais, Mademoiselle Adèle
    Comme à vingt ans savoure un roman de Dumas.

    Tout son boudoir divague en bizarre ramas,
    Cloître d’anciennetés, dont elle est le modèle;
    Là s’inscrusta l’émail de son culte fidèle:
    Vases, onyx, portraits,...

  •  

    Que vous disent les vieilles rues
    Des vieilles cités ? . . .
    Parmi les poussières accrues
    De leurs vétustés,
    Rêvant de choses disparues,
    ...