• Pourquoi pour mon malheur eus-je l'oeil si léger ?
    Pourquoi le sens si prompt, et l'esprit si fragile,
    Que de voir, que d'aimer, et que de m'engager
    A servir un bel oeil d'un labeur inutile ?

    Pour avoir vu je meurs, mais d'une mort subtile
    Qui renaît d'elle-même et ne fait que changer,
    Pour aimer je me vois tous les jours outrager,
    Et servant je...

  • Dieux, que le songe fait de travaux ressentir !
    J'ai cru voir en dormant un jardin plein de roses,
    Qui n'étaient point si tôt apparemment écloses
    Que mon oeil les voyait en soucis convertir.

    J'ai cru voir deux soleils leurs rayons départir
    Sur ces mêmes soucis, y faisant mêmes choses,
    Car tous deux les faisaient dessécher au sortir,
    Et reverdir...

  • Mes pleurs qui sur mon teint distillez si souvent,
    Pensant caver le coeur de ma fière inhumaine,
    Il vous faut mettre au rang de ces eaux d'Eurimène,
    Qui changent en rochers ceux qu'elles vont lavant.

    Vous empierrez son coeur que je vais poursuivant,
    Vainement je lui dis mon amour et ma peine,
    Elle ouit tout sans l'ouïr comme une idole vaine,
    Et...

  • Geler dedans les feux, et brûler dans la glace,
    Ne pouvoir à mes yeux accorder le sommeil,
    Vivre de désespoir attendant le cercueil,
    Effroyable porter la mort dessus ma face ;

    Verser, non pas des pleurs, mais du sang de mon oeil,
    Mêler la joie aux pleurs, et la crainte à l'audace,
    Gisant dedans mon lit n'arrêter point en place,
    Sitôt que le jour...

  • C'est assez soupirer pour un sujet pipeur
    Qui tourne à mon malheur ses amours en coutume,
    Pour aimer plus longtemps cette légère humeur
    Il me faudrait avoir un courage de plume.

    Elle a déjà cent fois mon amour délaissé,
    D'un mépris supposé déguisant son courage,
    Mais ce folâtre amour que j'eus par le passé
    Est maintenant contraint de céder à l'...

  • J'ai passé maintes nuits à me plaire en ces larmes,
    Ne trouvant rien plus doux ni plus délicieux,
    Pendant qu'Amour faisait la garde avec ses armes,
    De peur que le sommeil ne coulât en mes yeux.

    Mais si parfois ce dieu pour t'aller voir, ma Belle,
    Cessait de me garder, pendant qu'il me quittait,
    Il mettait près de moi le Songe en sentinelle,
    Qui m'...

  • Ô bois qui du soleil accusez l'impuissance,
    Recevant de ses traits la chaude violence
    Sans en être percé,
    Que n'ai-je comme vous fortifié mon âme
    Pour recevoir les coups du bel oeil qui m'enflamme
    Sans en être offensé !

    Que n'ai-je comme vous une écorce sauvage
    Insensible aux douleurs, comme vous à l'outrage
    Des hivers ravissants !
    ...

  • Belles fleurs que la lune en croissant fait paraître,
    Vous vous rapportez fort avec les autres fleurs,
    Car l'excès des humeurs comme vous les fait naître,
    Et vous tombez aussi par l'excès des chaleurs.

    Comme les fleurs nous font aimer le jardinage,
    Nous tirant par les yeux d'un fort enchantement,
    On dit que vous pouvez faire aimer davantage
    Si...

  • Ombres qui dans l'horreur de vos nuits éternelles
    Gémissez sans repos vos fautes criminelles,
    Quittez pour un petit vos manoirs gémissants,
    Et venez assurer qu'en sa peine fatale
    L'Enfer n'a point de peine à mes peines égale,
    Ni point de feux aussi comme ceux que je sens.

    Toi qui brûles de soif dans les ondes fuitives,
    La douleur ne tient point tes...

  • En vain par les destin, redoutables enfers,
    Vos cachots sont remplis de supplices divers
    Pour punir les forfaits des criminelles âmes,
    Étant comme elles sont absentes de leur dieu,
    Cette absence les doit tourmenter en ce lieu
    Plus rigoureusement que vos fouets ni vos flammes.

    Vos roues, vos rochers, et vos coulantes eaux
    Que des filles en vain...