• Le ciel, aux lueurs apaisées,
    Rougissait le feuillage épais,
    Et d'un soir de mai, doux et frais,
    On sentait perler les rosées.

    Tout le jour, le long des sentiers,
    Vous aviez, aux mousses discrètes,
    Cueilli les pâles violettes
    Et défleuri les églantiers.

    Vous aviez fui, vive et charmée,
    Par les taillis, en plein soleil ;
    Un flot de...

  • Éros m'a frappé d'une tige molle
    D'oeillets odorants récemment cueillis
    Il fuit à travers les sombres taillis,
    À travers les prés il m'entraîne et vole.
    Sans une onde vive où me ranimer,
    Je le suis, je cours dès l'aube vermeille ;
    Mes yeux sont déjà près de se fermer,
    Je meurs ; mais le Dieu me dit à l'oreille :
    - Oh ! le faible coeur qui ne peut...

  • Marbre sacré, vêtu de force et de génie,
    Déesse irrésistible au port victorieux,
    Pure comme un éclair et comme une harmonie,
    O Vénus, ô beauté, blanche mère des Dieux !

    Tu n'es pas Aphrodite, au bercement de l'onde,
    Sur ta conque d'azur posant un pied neigeux,
    Tandis qu'autour de toi, vision rose et blonde,
    Volent les Rires d'or avec l'essaim des Jeux....

  • Vous vivez lâchement, sans rêve, sans dessein,
    Plus vieux, plus décrépits que la terre inféconde,
    Châtrés dès le berceau par le siècle assassin
    De toute passion vigoureuse et profonde.

    Votre cervelle est vide autant que votre sein,
    Et vous avez souillé ce misérable monde
    D'un sang si corrompu, d'un souffle si malsain,
    Que la mort germe seule en cette...

  • Si les chastes amours avec respect louées
    Éblouissent encor ta pensée et tes yeux,
    N'effleure point les plis de leurs robes nouées,
    Garde la pureté de ton rêve pieux.
    Ces blanches visions, ces vierges que tu crées
    Sont ta jeunesse en fleur épanouie au ciel !
    Verse à leurs pieds le flot de tes larmes sacrées,
    Brûle tous tes parfums sur leur mystique autel...

  • Les belles filles aux pressoirs
    Portent sur leur tête qui ploie,
    À pleins paniers, les raisins noirs ;
    Les jeunes hommes sont en joie.
    Ils font jaillir avec vigueur
    Le vin nouveau des grappes mûres ;
    Et les rires et les murmures
    Et les chansons montent en choeur.

    Ivres de subtiles fumées,
    Les vendangeurs aux cheveux blancs
    Dansent...

  • I

    Sous les grottes de nacre et les limons épais
    Où la divine Mer sommeille et rêve en paix,
    Vers l'heure où l'Immortelle aux paupières dorées
    Rougit le pâle azur de ses roses sacrées,
    Je suis née, et mes soeurs, qui nagent aux flots bleus,
    M'ont bercée en riant dans leurs bras onduleux,
    Et, sur la perle humide entrelaçant leurs danses,
    ...

  • En la trentième année, au siècle de l'épreuve,
    Etant captif parmi les cavaliers d'Assur,
    Thogorma, le Voyant, fils d'Elam, fils de Thur,
    Eut ce rêve, couché dans les roseaux du fleuve,
    A l'heure où le soleil blanchit l'herbe et le mur.

    Depuis que le Chasseur Iahvèh, qui terrasse
    Les forts et de leur chair nourrit l'aigle et le chien,
    Avait lié son...

  • Silencieux, les poings aux dents, le dos ployé,
    Enveloppé du noir manteau de ses deux ailes,
    Sur un pic hérissé de neiges éternelles,
    Une nuit, s'arrêta l'antique Foudroyé.

    La terre prolongeait en bas, immense et sombre.
    Les continents battus par la houle des mers ;
    Au-dessus flamboyait le ciel plein d'univers ;
    Mais Lui ne regardait que l'abîme de l...

  • Sous le rideau lointain des escarpements sombres
    La lumière, par flots écumeux, semble choir ;
    Et les mornes pampas où s'allongent les ombres
    Frémissent vaguement à la fraîcheur du soir.

    Des marais hérissés d'herbes hautes et rudes,
    Des sables, des massifs d'arbres, des rochers nus,
    Montent, roulent, épars, du fond des solitudes,
    De sinistres...