• Vois, ce spectacle est beau. - Ce paysage immense
    Qui toujours devant nous finit et recommence ;
    Ces blés, ces eaux, ces prés, ce bois charmant aux yeux ;
    Ce chaume où l'on entend rire un groupe joyeux ;
    L'océan qui s'ajoute à la plaine où nous sommes ;
    Ce golfe, fait par Dieu, puis refait par les hommes,
    Montrant la double main empreinte en ses contours,...

  • Ô mes lettres d'amour, de vertu, de jeunesse,
    C'est donc vous ! Je m'enivre encore à votre ivresse ;
    Je vous lis à genoux.
    Souffrez que pour un jour je reprenne votre âge !
    Laissez-moi me cacher, moi, l'heureux et le sage,
    Pour pleurer avec vous !

    J'avais donc dix-huit ans ! j'étais donc plein de songes !
    L'espérance en chantant me berçait de mensonges...

  • L'église est vaste et haute. A ses clochers superbes
    L'ogive en fleur suspend ses trèfles et ses gerbes ;
    Son portail resplendit, de sa rose pourvu ;
    Le soir fait fourmiller sous la voussure énorme
    Anges, vierges, le ciel, l'enfer sombre et difforme,
    Tout un monde effrayant comme un rêve entrevu.

    Mais ce n'est pas l'église, et ses voûtes sublimes,...

  • C'était un grand château du temps de Louis treize.
    Le couchant rougissait ce palais oublié.
    Chaque fenêtre au loin, transformée en fournaise,
    Avait perdu sa forme et n'était plus que braise.
    Le toit disparaissait dans les rayons noyé.

    Sous nos yeux s'étendait, gloire antique abattue,
    Un de ces parcs dont l'herbe inonde le chemin,
    Où dans un coin,...

  • Tout est lumière, tout est joie,
    L'araignée au pied diligent
    Attache aux tulipes de soie
    Ses rondes dentelles d'argent.

    La frissonnante libellule
    Mire les globes de ses yeux
    Dans l'étang splendide où pullule
    Tout un monde mystérieux !

    La rose semble, rajeunie,
    S'accoupler au bouton vermeil ;
    L'oiseau chante plein d'harmonie
    ...

  • Sed satis est jam posse mori.
    LUCAIN.


    Où donc est le bonheur ? disais-je. - Infortuné !
    Le bonheur, ô mon Dieu, vous me l'avez donné.

    Naître, et ne pas savoir que l'enfance éphémère,
    Ruisseau de lait qui fuit sans une goutte amère,
    Est l'âge du bonheur, et le plus beau moment
    Que l'homme, ombre qui passe, ait sous le firmament !
    ...

  • Vous êtes bien belle et je suis bien laid.
    A vous la splendeur de rayons baignée ;
    A moi la poussière, à moi l'araignée.
    Vous êtes bien belle et je suis bien laid ;
    Soyez la fenêtre et moi le volet.

    Nous réglerons tout dans notre réduit.
    Je protégerai ta vitre qui tremble ;
    Nous serons heureux, nous serons ensemble ;
    Nous réglerons tout dans notre...

  • S'il est un charmant gazon
    Que le ciel arrose,
    Où brille en toute saison
    Quelque fleur éclose,
    Où l'on cueille à pleine main
    Lys, chèvrefeuille et jasmin,
    J'en veux faire le chemin
    Où ton pied se pose !

    S'il est un sein bien aimant
    Dont l'honneur dispose,
    Dont le ferme dévouement
    N'ait rien de morose,
    Si toujours ce...

  • Le ciel d'étain au ciel de cuivre
    Succède. La nuit fait un pas.
    Les choses de l'ombre vont vivre.
    Les arbres se parlent tout bas.

    Le vent, soufflant des empyrées,
    Fait frissonner dans l'onde, où luit
    Le drap d'or des claires soirées,
    Les sombres moires de la nuit.

    Puis la nuit fait un pas encore.
    Tout à l'heure, tout écoutait....

  • Dans les ravins la route oblique
    Fuit. - Il voit luire au-dessus d'eux
    Le ciel sinistre et métallique
    A travers des arbres hideux.

    Des êtres rôdent sur les rives ;
    Le nénuphar nocturne éclôt ;
    Des agitations furtives
    Courbent l'herbe, rident le flot.

    Les larges estompes de l'ombre,
    Mêlant les lueurs et les eaux,
    Ébauchent...