• Nous sommes frères : la fleur
    Par deux arts peut être faite.
    Le poète est ciseleur ;
    Le ciseleur est poëte.

    Poètes ou ciseleurs,
    Par nous l'esprit se révèle.
    Nous rendons les bons meilleurs,
    Tu rends la beauté plus belle.

    Sur son bras ou sur son cou,
    Tu fais de tes rêveries,
    Statuaire du bijou,
    Des palais de...

  • Lorsque ma main frémit si la tienne l'effleure,
    Quand tu me vois pâlir, femme aux cheveux dorés,
    Comme le premier jour, comme la première heure,
    Rien qu'en touchant ta robe et ses plis adorés ;

    Quand tu vois que les mots me manquent pour te dire
    Tout ce dont tu remplis mon sein tumultueux ;
    Lorsqu'en me regardant tu sens que ton sourire
    M'enivre...

  • Qu'es-tu ? quoi, tu descends de là-haut, misérable !
    Quoi ! toi, le plomb, le feu, la mort, l'inexorable,
    Reptile de la guerre au sillon tortueux,
    Quoi ! toi, l'assassinat cynique et monstrueux
    Que les princes du fond des nuits jettent aux hommes,
    Toi, crime, toi, ruine et deuil, toi qui te nommes
    Haine, effroi, guet-apens, carnage, horreur, courroux,
    ...

  • Monsieur Prudhomme est un veau
    Qui s'enrhume du cerveau
    Au moindre vent frais qui souffle.
    Prudhomme, c'est la pantoufle
    Qu'un roi met sous ses talons
    Pour marcher à reculons.

    Je fais la chansonnette,
    Faites le rigodon.
    Ramponneau, Ramponnette, don !
    Ramponneau, Ramponnette !

    Ce Prudhomme est un grimaud
    Qui prend sa...

  • L'enfant avait reçu deux balles dans la tête.
    Le logis était propre, humble, paisible, honnête ;
    On voyait un rameau bénit sur un portrait.
    Une vieille grand-mère était là qui pleurait.
    Nous le déshabillions en silence. Sa bouche,
    Pâle, s'ouvrait ; la mort noyait son oeil farouche ;
    Ses bras pendants semblaient demander des appuis.
    Il avait dans sa poche une...

  • L'oiseau chante ; je suis au fond des rêveries.

    Rose, elle est là qui dort sous les branches fleuries,
    Dans son berceau tremblant comme un nid d'alcyon,
    Douce, les yeux fermés, sans faire attention
    Au glissement de l'ombre et du soleil sur elle.
    Elle est toute petite, elle est surnaturelle.
    Ô suprême beauté de l'enfant innocent !
    Moi je pense,...

  • Regardez : les enfants se sont assis en rond.
    Leur mère est à côté, leur mère au jeune front
    Qu'on prend pour une soeur aînée ;
    Inquiète, au milieu de leurs jeux ingénus,
    De sentir s'agiter leurs chiffres inconnus
    Dans l'urne de la destinée.

    Près d'elle naît leur rire et finissent leurs pleurs.
    Et son coeur est si pur et si pareil aux leurs,
    Et sa...

  • La hache ? Non. Jamais. Je n'en veux pour personne.
    Pas même pour ce czar devant qui je frissonne,
    Pas même pour ce monstre à lui-même fatal.
    Qui supprime Tyburn abolit White-Hall ;
    Et quand la mort, ouvrant son désastreux registre,
    Me dit : - Que jettes-tu dans ce panier sinistre ?
    Ou la tête du peuple, ou la tête du roi ?
    Je dis : - Ni celle-ci, ni...

  • L'hirondelle au printemps cherche les vieilles tours,
    Débris où n'est plus l'homme, où la vie est toujours ;
    La fauvette en avril cherche, ô ma bien-aimée,
    La forêt sombre et fraîche et l'épaisse ramée,
    La mousse, et, dans les noeuds des branches, les doux toits
    Qu'en se superposant font les feuilles des bois.
    Ainsi fait l'oiseau. Nous, nous cherchons, dans la...

  • PREMIERE PROMENADE

    Un tourbillon d'écume, au centre de la baie
    Formé par de secrets et profonds entonnoirs,
    Se berce mollement sur ronde qu'il égaie,
    Vasque immense d'albâtre au milieu des flots noirs.

    Seigneur ! que faites-vous de cette urne de neige ?
    Qu'y versez-vous dès l'aube et qu'en sort-il la nuit ?
    La mer lui jette en vain sa vague qui...