• Circé pâle et farouche, à vous, magicienne,
    A vous mon âme, à vous mes chansons, car toujours,
    Ravivant le foyer de ma douleur ancienne,
    Vous creusez sous mes pas un abîme où je cours.

    J’y cours avec bonheur, car sur vos noirs rivages
    Les rosiers idéals se mêlent aux cyprès,
    Préparez sans remords les funestes breuvages,
    Et donnez-moi vos mains...

  •  
    Dans ces murs où l’écho répète les hoquets
    De son oncle Jérôme, au milieu des laquais
    Qui lui disent encor : « Sire, » le Bonaparte,
    Par instants, fixe un œil abruti sur la carte.
    Il voit les prussiens avancer sur Paris ;
    Il ricane. Un exprès annonce qu’on a pris
    Un village et brûlé dix maisons ; il jubile.
    Laid, vomissant sa joie avec un flot...

  •  
    La douce Isabelle d’Espagne
    Songeait dans son appartement,
    Patrocinio, sa compagne,
    Priait le ciel dévotement,

    Quand on vint lui dire : « L’empire
    De votre ami Napoléon,
    À l’heure où nous parlons, expire,
    Reine de Castille et Léon. »

    Puis on lui conta la déroute
    De Sedan, cette lâcheté
    De l’homme qui fit banqueroute
    À...

  •  
    À Lahire, à Turenne, à Villars, à Marceau,
    À ces vaillants de France, héroïque faisceau
    De cœurs purs, de bras fort et de natures fières,
    À tous ces fronts baignés d’éclatantes lumières,
    À tous ces preux sans peur que la patrie en deuil
    Montre encore à l’Europe avec un mâle orgueil,
    À Bayard, à Kléber, à toute cette gloire
    Dont les rayons...

  •  
    « Ils osent résister ! » disent-ils. Nous osons.
    Parce qu’ils ont chez eux l’homme des trahisons,
    Ils pensent nous trouver abattus. Bêtes brutes !
    Mais ce coup décisif et fatal que vous crûtes
    Nous porter, s’est tourné contre vous justement.
    Décapité d’un roi, le bon peuple allemand
    Peut se croire perdu, crier miséricorde,
    Et tendre un cou...

  •  
    On ne le croyait pas si lâche, en vérité !
    On le savait menteur, voleur, fourbe, effronté,
    Assassin. On n’avait pas oublié ses crimes.
    On le savait expert en ces louches escrimes
    Des trahisons par qui l’on se sent enlacé.
    Bien que, Morny défunt, il eût parfois baissé,
    Et bien qu’il se montrât un peu moins fataliste,
    N’étant plus soutenu par ce...

  • Oh ! nous lui porterons nos souvenirs encore
    À cet esprit charmant, à cet être joyeux,
    À ce visage ouvert et franc comme une aurore,
    Et dont la mort, hélas ! vient de clore les yeux.

    Pauvres comédiens poursuivant une étoile
    Qui nous guide, au hasard des plaines et des monts,
    Vagabonds dont le ciel souvent sombre se voile,
    Cet ami disparu, plus que...

  •  
    Il est des villes qui sont fières
    De se changer en cimetières
    Plutôt que de voir outrager
    Leurs foyers, leurs maisons, leurs rues,
    Et leurs morts, ombres apparues
    Terribles devant l’étranger !

    Elles n’ont qu’un mot : résistance !
    Elles donnent leur existence
    Stoïquement et gravement ;
    La grande âme de la patrie
    Vit...

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    À Jules Janin.

    Proscrite par la haine implacable d’Héré,
    La fille de Cϟs fuyait. Les noirs rivages,
    Où bouillonne l’épaisse écume aux bonds sauvages,
    Refusaient leur sol dur à son pas abhorré.

    Parfois, devant la gueule horrible des repaires,
    Où les fauves grondants abritent leurs petits,
    Levant, avec effort, ses bras...

  • Ils vont pieds nus le plus souvent. L’hiver
    Met à leurs doigts des mitaines d’onglée.
    Le soir, hélas ! ils soupent du grand air,
    Et sur leur front la bise échevelée
    Gronde, pareille au bruit d’une mêlée,
    A peine un peu leur sort est adouci
    Quand avril fait la terre consolée :
    Ayez pitié des Enfants sans souci.

    Ils n’ont sur eux que le manteau du...