• Telle qu'une vapeur s'épaississant toujours,
    La nuit grave s'étend sur les îles boisées ;
    Les plus belles au loin, déjà semblent rasées
    Et les rives n'ont plus que de fuyants contours.

    A mes pieds, le vent d'est chassant l'onde à rebours,
    Courbe les joncs comme autant d'âmes angoissées.
    - Veux-tu que nous allions reposer nos pensées
    Dans l'ombre qui...

  • Ainsi qu'en embuscade au socle qui l'attache
    Et nu, comme autrefois ses aïeux au désert,
    L'Iroquois belliqueux ranimé par Hébert,
    Dans sa main de vaincu brandit toujours la hache.

    Sous la pluie et la neige, impassible, il revoit
    Les pirogues dansant de rapide en rapide,
    Les poteaux de torture et les scalpes humides,
    Les chasses des tribus...

  • Le même triste accent vient toujours des rapides,
    Toujours les mêmes flots font le même circuit
    En recueillant le rêve et l'espoir dans leurs rides.

    Je l'ai senti déjà le vent de cette nuit ;
    Il conserva mes paroles et les répète,
    Et de naïfs couplets renaissent avec lui.

    Un firmament connu resplendit sur ma tête.
    Les étoiles de l'an passé sont...

  • Audacieusement sise à cette hauteur,
    Cette maison proprette et d'une vigne ornée
    Est au milieu d'un tel déploiement de splendeur
    Que l'on devrait, il semble, y trouver le bonheur.
    Pourtant elle est abandonnée.

    Abandonnée, avec ces champs verts alentour !
    Vide, quand on peut voir de toutes ses fenêtres
    Des coteaux, des vallons et des coteaux toujours...

  • Chapelets, bruits de pas, accès de toux, murmures...
    Des légions d'ave s'en vont heurter au ciel.
    L'orgue joue en sourdine un antique noël
    Et le peuple, tout bas, répète les mesures.

    Ils reviennent couverts de nouvelles blessures
    Ceux qui de l'an dernier espéraient tant de miel,
    Et gagnés par la crèche, offrent à l'Eternel
    L'encens de leur espoir en ses...

  • J'ai dit à la forêt haute et pleine d'orgueil :
    " Tuer, seul me déride ;
    J'irai dans tes abris dépister le chevreuil
    Et le lièvre timide. "

    Lors la forêt m'offrit, pour mon repos du soir,
    Un lit d'herbe et de mousse
    Où la lune envoyait, entre les rameaux noirs,
    Une lumière douce.

    Je sommeillais lorsque des grenouilles sautant,
    ...

  • C'est la neige tourbillonnante
    Qui voltige dans l'air, mousseline vivante,
    La neige qui s'arma, dans l'extase du froid,
    D'une beauté trop loin de la vie et traîtresse.
    La neige pleine de caresses,
    Si douce au pas quand elle choit.

    Ceux-là dont le sang bout dans les veines, les forts,
    Devant la blancheur qui s'amasse
    Songent aux glissements...

  • Or, le sage, parti dès son adolescence
    Pour juger les flambeaux qui le devaient guider,
    Savait à quel néant marche la connaissance
    Et confondait la vérité d'une croyance
    Avec l'or, qui vaudra ce qu'on a décidé.

    Les dieux que la pensée humaine, en son ornière,
    Conçut et projeta dans le calme irréel,
    Les dieux dont elle attend un rayon de lumière...

  • Je connais, dans les Apalaches,
    Un val séduisant qui se cache
    Comme un rêve ingénu ;
    Un val aux pentes fantaisistes
    Où se promène, dans les schistes,
    Un ruisseau bienvenu.

    Quand, brusquement, on le découvre
    C'est un avenir clair qui s'ouvre,
    Un sourire enjôleur
    À quoi l'âme n'était pas prête,
    On subit le charme, on s'arrête
    À l'...

  • Aux pieds de trois coteaux habillés de sapins
    Gît un lac profond, clair et sage,
    Où maintes fois je suis descendu, le matin,
    Aspirer la paix qu'il dégage.

    Rond et luxuriant, à son centre, un îlot
    Ressemble au chaton d'une bague ;
    Les arbres alentour, penchés au bord de l'eau,
    Y dessinent des formes vagues.

    Libre de quais encore, à nul...