• Souvent un grand désir de choses inconnues,
    D'enlever mon essor aussi haut que les nues,
    De ressaisir dans l'air des sons évanouis,
    D'entendre, de chanter mille chants inouïs,
    Me prend à mon réveil ; et voilà ma pensée
    Qui, soudain rejetant l'étude commencée,
    Et du grave travail, la veille interrompu,
    Détournant le regard comme un enfant repu,
    ...

  • Que de fois, près d'Oxford, en ce vallon charmant,
    Ou l'on voit fuir sans fin des collines boisées
    Des bruyères couper des plaines arrosées,
    La rivière qui passe et le vivier dormant,

    Pauvre étranger d'hier, venu pour un moment,
    J'ai reconnu, parmi les maisons ardoisées,
    Le riant presbytère et ses vertes croisées,
    Et j'ai dit en mon coeur : Vivre ici...

  • J'ai fait le tour des choses de la vie ;
    J'ai bien erré dans le monde de l'art ;
    Cherchant le beau, j'ai poussé le hasard:
    Dans mes efforts la grâce s'est enfuie !

    A bien des coeurs où la joie est ravie,
    J'ai demandé du bonheur, mais trop tard !
    A maint orage, éclos sous un regard,
    J'ai dit : Renais, ô flamme évanouie !

    Et j'ai trouvé, bien...

  • Laissez-moi ! tout a fui. Le printemps recommence ;
    L'été s'anime, et le désir a lui ;
    Les sillons et les coeurs agitent leur semence.
    Laissez-moi ! tout a fui.

    Laissez-moi ! dans nos champs, les roches solitaires,
    Les bois épais appellent mon ennui.
    Je veux, au bord des lacs, méditer leurs mystères,
    Et comment tout m'a fui.

    Laissez-moi m'...

  • pour un ami qui publiait une édition de ce poète

    A toi, Ronsard, à toi, qu'un sort injurieux
    Depuis deux siècles livre aux mépris de l'histoire,
    J'élève de mes mains l'autel expiatoire
    Qui te purifiera d'un arrêt odieux.

    Non que j'espère encore, au trône radieux
    D'où jadis tu régnais, replacer ta mémoire ;
    Tu ne peux de si bas remonter à la...

  • Enfant, je m'étais dit et souvent répété :
    " Jamais, jamais d'amour ; c'est assez de la gloire ;
    En des siècles sans nombre étendons ma mémoire,
    Et semons ici-bas pour l'immortalité. "

    Plus tard je me disais : " Amour et volupté,
    Allez, et gloire aussi ! que m'importe l'histoire ?
    Fantôme au laurier d'or, vierges au cou d'ivoire,
    Je vous fuis pour l'...

  • Les dimanches d'été, le soir, vers les six heures,
    Quand le peuple empressé déserte ses demeures
    Et va s'ébattre aux champs,
    Ma persienne fermée, assis à ma fenêtre,
    Je regarde d'en haut passer et disparaître
    Joyeux bourgeois, marchands,

    Ouvriers en habits de fête, au coeur plein d'aise ;
    Un livre est entr'ouvert près de moi, sur ma chaise :
    Je...

  • J'étais un arbre en fleur où chantait ma Jeunesse,
    Jeunesse, oiseau charmant, mais trop vite envolé,
    Et même, avant de fuir du bel arbre effeuillé,
    Il avait tant chanté qu'il se plaignait sans cesse.

    Mais sa plainte était douce, et telle en sa tristesse
    Qu'à défaut de témoins et de groupe assemblé,
    Le buisson attentif avec l'écho troublé
    Et le...

  • Octobre.

    Après la moisson faite et tous les blés rentrés,
    Quand depuis plus d'un mois les champs sont labourés,
    Qu'il gèlera demain, et qu'une fois encore
    L'Automne, du plus haut des coteaux qu'elle dore,
    Se retourne en fuyant, le front dans un brouillard,
    Oh ! que la plaine est triste autour du boulevard !
    C'est au premier coup doeil une morne...

  • La voilà, pauvre mère, à Paris arrivée
    Avec ses deux enfants, sa fidèle couvée !
    Veuve, et chaste, et sévère, et toute au deuil pieux,
    Elle les a, seize ans, élevés sous ses yeux
    En province, en sa ville immense et solitaire,
    Déserte à voir, muette autant qu'un monastère,
    Où croît l'herbe au pavé, la triste fleur au mur,
    Au coeur le souvenir long,...