• Nous longerons la grille du parc,
    A l'heure où la Grande Ourse décline ;
    Et tu porteras - car je le veux -
    Parmi les bandeaux de tes cheveux
    La fleur nommée asphodèle.

    Tes yeux regarderont mes yeux ;
    A l'heure où la grande Ourse décline. -
    Et mes yeux auront la couleur
    De la fleur nommée asphodèle.

    Tes yeux regarderont mes yeux,
    Et...

  • Quand reviendra l'automne avec les feuilles mortes
    Qui couvriront l'étang du moulin ruiné,
    Quand le vent remplira le trou béant des portes
    Et l'inutile espace où la meule a tourné,

    Je veux aller encor m'asseoir sur cette borne,
    Contre le mur tissé d'un vieux lierre vermeil,
    Et regarder longtemps dans l'eau glacée et morne
    S'éteindre mon image et le pâle...

  • Et j'irai le long de la mer éternelle
    Qui bave et gémit en les roches concaves,
    En tordant sa queue en les roches concaves ;
    J'irai tout le long de la mer éternelle.

    Je viendrai déposer, ô mer maternelle,
    Parmi les varechs et parmi les épaves,
    Mes rêves et mon orgueil, mornes épaves,
    Pour que tu les berces, ô mer maternelle.

    Et j'écouterai...

  • Oisillon bleu couleur-du-temps,
    Tes chants, tes chants
    Dorlotent doucement les coeurs
    Meurtris par les destins moqueurs.

    Oisillon bleu couleur-du-temps,
    Tes chants, tes chants
    Donnent de nouvelles vigueurs
    Aux corps minés par les langueurs.

    Oisillon bleu couleur-du-temps,
    Tes chants, tes chants
    Font revivre les espoirs morts
    Et...

  • Ce n'est pas vers l'azur que mon esprit s'envole :
    Je pense à toi, plateau hanté des chevriers.
    Aux pétales vermeils, à la blanche corolle,
    Je préfère le deuil de tes genévriers.

    Noir plateau, ce qui berce une audace rendue,
    Ce n'est point le zéphyr sur les flots de la mer,
    C'est la plainte du vent sur ta morne étendue
    Où je voudrais songer prisonnier...

  • Vous, avec vos yeux, avec tes yeux,
    Dans la bastille que tu hantes !
    Celui qui dormait s'est éveillé
    Au tocsin des heures beuglantes.
    Il prendra sans doute
    Son bâton de route
    Dans ses mains aux paumes sanglantes.

    Il ira, du tournoi au combat,
    À la défaite réciproque ;
    Qu'il fende heaumes beaux et si clairs,
    Son pennon, qu'il...

  • Téthys qui m'as vu naître, ô Méditerranée !
    Quinze fois le Taureau nous ramena l'année,
    Depuis que, par ton zèle exilé de ton sein,
    Ton aimable couleur à mes yeux fut ravie.
    Certes, mon âme est forte et brave est mon dessein,
    Et rapide est mon soc dans la trace suivie :
    Et jà ma bouche a su entonner l'aquilon
    Avecque l'Euménis, dans l'airain d'Apollon,
    ...

  • Quand je viendrai m'asseoir dans le vent, dans la nuit,
    Au bout du rocher solitaire,
    Que je n'entendrai plus, en t'écoutant, le bruit
    Que fait mon coeur sur cette terre,

    Ne te contente pas, Océan, de jeter
    Sur mon visage un peu d'écume :
    D'un coup de lame alors il te faut m'emporter
    Pour dormir dans ton amertume.

  • Chênes mystérieux, forêt de la Grésigne,
    Qui remplissez le gouffre et la crête des monts,
    J'ai vu vos clairs rameaux sous la brise bénigne
    Balancer doucement le ciel et ses rayons.

    Ah ! Dans le sombre hiver, pendant les nuits d'orage,
    Lorsqu'à votre unisson lamentent les corbeaux,
    Lorsque passe l'éclair sur votre fier visage,
    Chênes que vous devez être...

  • Les morts m'écoutent seuls, j'habite les tombeaux.
    Jusqu'au bout je serai l'ennemi de moi-même.
    Ma gloire est aux ingrats, mon grain est aux corbeaux,
    Sans récolter jamais je laboure et je sème.

    Je ne me plaindrai pas. Qu'importe l'Aquilon,
    L'opprobre et le mépris, la face de l'injure !
    Puisque quand je te touche, ô lyre d'Apollon,
    Tu sonnes...