J’ai été visiter la vieille maison triste
du village où vécurent les anciens parents :
la route en cabriolet, pleine de soleil
était toute triste et douce comme le miel.
Il y avait la plaine bleue et des pigeons
qui volaient le long des labours que nous longions.
La jument était bien vieille et bien fatiguée.
Elle me faisait de la peine et semblait...
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J’ai été visiter la vieille maison triste
du village où vécurent les anciens parents :
la route en cabriolet, pleine de soleil,
était toute triste et douce comme le miel.
Il y avait la plaine bleue et des pigeons
qui volaient le long des labours que nous longions.
La jument était bien vieille et bien fatiguée.
Elle me faisait de la peine et semblait... -
J’ai fumé ma pipe en terre et j’ai vu les bœufs,
avec la barre au front et le museau morveux,
résister aux paysans qui leur piquaient la croupe
par-dessus les cornes — et j’ai vu, douce troupe,
défiler les brebis touffues aux jambes faibles.
Le bon chien faisait semblant d’être en colère.
Et le berger lui criait : Loup ! Viens ! Loup ! Ici !
Alors le... -
« J’ai quelqu’un dans le cœur », deviez-vous dire un jour
à ceux qui vous proposeraient un autre amour.
« J’ai quelqu’un dans le cœur. » Et ce quelqu’un, c’est moi.
« J’ai quelqu’un dans le cœur. » Je pensais à cela,
à ces mots infinis par lesquels vous donniez
votre cœur à mon cœur, ô lierre qui mouriez…
Et je ne sais pourquoi, songeant à votre cœur,
... -
J’ai une pipe en bois, noire et ronde comme le sein
d’une petite négresse dont j’ai vu le dessin
dans un livre intéressant où elle était nue...
Cette pipe me fait songer que dans la rue
et dans les jardins publics pleins de moineaux,
de petits pains brisés dans la boue, de jets d’eau,
on rencontre de bonnes négresses en foulards jaunes.
Elles sont... -
J’aime dans le temps Clara d’Ellébeuse,
l’écolière des anciens pensionnats,
qui allait, les soirs chauds, sous les tilleuls
lire les magazines d'autrefois.Je n’aime qu’elle, et je sens sur mon cœur
la lumière bleue de sa gorge blanche.
Où est-elle ? Où était donc ce bonheur ?
Dans sa chambre claire il entrait des branches.Elle n’est...
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J’aime l’âne si doux
marchant le long des houx.Il prend garde aux abeilles
et bouge ses oreilles ;et il porte les pauvres
et des sacs remplis d’orge.Il va, près des fossés,
d’un petit pas cassé.Mon amie le croit bête
parce qu’il est poète.Il réfléchit toujours.
Ses yeux sont en velours.Jeune fille au...
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J’allai à Lourdes par le chemin de fer,
le long du gave qui est bleu comme l’air.Au soleil les montagnes semblaient d’étain.
Et l’on chantait : sauvez ! sauvez ! dans le train.Il y avait un monde fou, exalté,
plein de poussière et du soleil d’été.Des malheureux avec le ventre en avant
étendaient leurs bras, priaient en les tordant.Et...
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J’allais dans le verger où les framboises au soleil
chantent sous l’azur à cause des mouches à miel.
C’est d’un âge très jeune que je vous parle.
Près des montagnes je suis né, près des montagnes.
Et je sens bien maintenant que dans mon âme
il y a de la neige, des torrents couleur de givre
et de grands pics cassés où il y a des oiseaux
de proie qui... -
Je crève de pitié, d’aimer et de sourire :
mais, sourire, ne m’est pas toujours possible,et ce petit chat m’a rempli d’une tristesse grise.
Il miaulait sous la grande porte de la mairie,par ce soir pluvieux, boueux, et j’ai senti
toute l’infinité résignée et muettede la douleur des bêtes, de la douleur des bêtes.
Mon Dieu : qu’allait-il faire ?...